Midi Libre publie un témoignage édifiant sur l’intérieur de l’ultra-droite



Midi Libre
publie ce 8 octobre (ici)
le témoignage d’un  militant
repenti de l’ultra-droite. Il montre la radicalisation de jeunes des villages
qui ont le sentiment d’être de seconde zone mais dont le malaise est ignoré. 
Le témoignage
montre aussi comment  l’extrême droite
assouplit le vocabulaire et les formulations pour diffuser son message. 
Il est indiqué que les militants d’extrême droite ont la
consigne d’utiliser les réseaux sociaux et d’envahir les commentaires des sites
de presse. Témoignage instructif aussi car l’ex-militant a un regard très critique sur son ancien engagement, expliquant comment avec la dénonciation des immigrés, il a contribué à créer un écran de fumée au lieu de s’attaquer aux vrais profiteurs. 





Midi Libre
publie ce 8 octobre (ici)
le témoignage d’un  militant
repenti de l’ultra-droite. Il montre la radicalisation de jeunes des villages
qui ont le sentiment d’être de seconde zone mais dont le malaise est ignoré,
ces jeunes trouvent  alors un
bouc-émissaire :  les
étrangers.

Le témoignage
montre aussi comment pour mieux diffuser son message, l’extrême droite
assouplit le vocabulaire. Elle utilise alors des formules dont le sens effectif
reste cependant tout à fait clair pour les militants.

Il est indiqué,
ce que nous dénoncions sur ce site, que les militants d’extrême droite ont la
consigne d’utiliser les réseaux sociaux et d’envahir les commentaires des sites
de presse (voir pour illustration les commentaires sur l’article en question),
d’y faire des provocations : insultes contre les français en prenant un nom à
consonance arabe (« plus c’est gros
plus ça marche 
»)

En conclusion l’ex militant
d’extrême droite indique : « au
moment où il faudrait surtout parler d’économie et de salaire, qui est le noeud
du problème. Pour moi, pendant des années, j’ai contribué à créer l’écran de
fumée
(NDR : parler
d’islamisme, d’immigration)
qui protège ceux contre lesquels je me battais vraiment 



MIDI LIBRE 

Un militant repenti balance les secrets
de l’ultra-droite
 



Damien
(1) a été, pendant quatre ans, membre d’une petite organisation politique
d’extrême-droite proche du Bloc Identitaire. Originaire d’un petit village dans
l’Aude, il a côtoyé pendant une dizaine d’années un groupe de militants de la
région dont le but était de « réveiller les consciences nationales »
comme il le dit, en agissant principalement sur internet. Rangé des voitures,
il a souhaité témoigner de cette période de sa vie et de ses dérives.

Comment
êtes-vous entré en politique ?

Au
départ c’était par le rock. On était plusieurs jeunes du village à écouter Vae Victis, Insurrection, tout ça. Les paroles nous
touchaient et en cherchant on a rencontré des militants d’Unité Radicale (UR) qui étaient à Bédarieux. Ca a tout
de suite collé. Dire enfin tout haut que les étrangers venaient coloniser le
pays, que les vrais Français des villages comme nous étaient des citoyens de
seconde zone, tout ce qu’ils disaient semblait évident à l’époque.

Vous
dites « semblez ». Vous n’êtes plus aussi certain d’avoir raison ?

Ma vie
a changé. Je suis en train de terminer un master II à Montpellier et j’ai mis
de l’eau dans mon vin. La façon de penser des identitaires m’a empêché
d’avancer, si j’avais continué comme ça je serais resté dans mon bled à
détester la terre entière.

Combien
étiez-vous ?

Il y a
eu pas mal de changement à UR, et le petit groupe auquel j’ai appartenu après
sa dissolution revendiquait une cinquantaine de membres dans toute la France.
Et sept dans l’Aude, plusieurs d’Olonzac, de Narbonne et un de Coursan. Nous
nous réunissions une fois par semaine chez l’un ou chez l’autre, mais
l’essentiel des messages passait par internet.

Quels
étaient vos buts ?

On
partait du principe que notre rôle était de « réveiller les consciences
nationales », de dire la vérité aux Français, qui étaient anesthésiés par
les politiques et les médias. Nous considérions que les médias mentaient tous,
que nous vivions dans un Etat « ripoublicain », corrompu par des
élites mondialistes, que la race blanche était en danger, tout ça. Et comme on
était peu nombreux, on a surtout utilisé internet. C’était pratique pour faire
passer nos messages, et ça ne coûtait pas d’argent.

Je
sais qu’au Bloc (Bloc identitaire, NDLR) et au FN ils ont
des méthodes analogues, l’essentiel de celles que nous utilisions venaient
d’ailleurs de leur fascicules de formation des militants.

Comment
procédiez-vous ?

Tout
était assez codifié. Il fallait en priorité « squatter » les sites
d’information générale à la recherche de toutes les informations
« raciales » possibles. Monter en épingle les fais divers lorsqu’ils
concernaient des étrangers, quitte à les faire « mousser » sur
Facebook ou sur les forums. Les réseaux sociaux et les commentaires dans les
articles de presse étaient l’idéal pour ça.

Nous
avions clairement identifié l’idée qu’il fallait que nous ayons des pseudonymes
« réguliers » de manière à recruter à nos idées, de manière à ce que
les gens, à force de lire notre nom se disent : « Il a raison ce gars-là »
et se rapprochent de nous. Il fallait aussi créer des profils
« ponctuels » juste pour donner l’effet de masse, donner l’impression
que c’était la « base » des gens qui pensait comme nous. Ca, c’était
facile, parce que globalement les gens partagent nos idées sur les délinquants.

Mais
il fallait agir subtilement. Ne jamais parler des Arabes et des Blancs en tant
que tel, mais reprendre des thèmes « humanistes » en parlant par
exemple des « nantis antiracistes et mondialistes qui cherchent à écraser
les pauvres qui supportent le racisme antiblanc ».

Quel
était votre rôle précisément ?

Mon
travail consistait aussi à faire des revues de presse sur plusieurs blogs, et
en ne prenant que les histoires qui mettent en scène des étrangers pour ensuite
de démontrer que tout les problèmes venaient d’eux. Mais évidemment, on ne se
limitait pas aux faits divers. Il était super-important aussi de prendre les
articles parlant des initiatives sur la « diversité ». Ce mot est
parfait pour détecter les articles de presse où il va être question d’argent
public donné aux associations étrangères.

En
publiant souvent des articles sur ces sujets on pouvait ensuite facilement s’y
référer pour donner l’impression que les pouvoirs publics se soucient plus du
bien-être des immigrés que des « Blancs» (le mot que nous employions à
l’époque pour parler de nous).

Pourtant
ce genre de discours tombe facilement sous le coup de la loi contre
l’incitation à la haine raciale…

Bien
sûr. C’est la raison pour laquelle nous avons développé notre terminologie, en
disant les choses d’une certaine manière: « être positif ». Ne pas
dire « c’est la guerre civile, les Arabes ne veulent pas être
intégré ». Une telle phrase fait fuir les gens qui ne sont pas engagés à
nos côté, mais dire « la plus grande fermeté est nécessaire pour retrouver
la paix civile ». Ca veut dire la même chose, parce que ça donne à penser
qu’on est en guerre, mais ça donne l’impression qu’on est plein de sagesse.

Les
gens « mordent » beaucoup plus facilement à tout ça, et finalement,
ce sont eux-mêmes qui dans les commentaires vont dire ce que nous, on ne peut
pas écrire.

Après
tout s’enchaîne. Comme les gens répétent le même discours que nous, mais sans
précautions oratoires, leurs commentaires sont censurés par les journaux
« sérieux » (la loi interdit ce genre de discours et les journaux se
protègent en ne les publiant pas). Il est alors extrêmement facile de les
épauler en critiquant la scandaleuse censure dont font l’objet ceux qui pensent
comme nous, et à parler d’une collusion entre les médias et les
« antifrançais ».

Vous
avez d’autres exemples ?

Je pourrais
en donner pendant des heures, mais par exemple il suffit de prendre un pseudo à
consonance musulmane et lancer des insultes aux Français, en prônant une
République islamiste à Paris ou ce genre de choses. C’est très gros mais ça
marche à chaque fois.

Vous
n’aviez pas l’impression, avec ces méthodes, d’être vous même à l’origine d’une
manipulation politique ?

Bien
sûr que non. Puisqu’on était sûrs d’avoir raison, que les mondialistes
voulaient notre peau, tout les moyens étaient bons. De toute façon, sans
creuser vraiment l’actualité, c’est toujours ce qui émergeait, alors c’était
facile de le mettre en avant. Défendre la « race » nous paraissait
être une mission sacrée.

Bien
sûr maintenant, je me rends compte que les « flots d’argent »
déversés sur les associations d’immigrés sont surtout là pour gagner la paix
sociale, qu’il s’agit d’initiatives bidon pour éviter une explosion des
banlieues, et que souvent même l’argent annoncé n’arrive pas jusque là. Sans
compter qu’il s’agit en réalité de petites sommes.

J’ai
compris aussi qu’on parlait surtout de délinquance quotidienne, des petits
trucs comme des vols de sac à main ou des voitures incendiées, mais qu’on ne
parlait pas de certaines « grosses affaires », parce qu’elle ne
concernait pas des étrangers. Et que les gros délinquants, les banquiers et les
hommes d’affaires véreux, on n’en parlait jamais, sauf lorsque « par
bonheur » ils étaient juifs, franc-maçon ou ce genre de chose et que donc
on pouvait en tirer le fil du complot des « riches antiracistes ».

Avec
le recul, je sais maintenant que le problème de la délinquance est lié à la
pauvreté de certaines populations, et pas à leur origine ethnique, mais pour un
rural comme je l’étais à l’époque les choses étaient différentes. Je réagissais
avec mes tripes pas avec ma tête.

Avez-vous
participé à la compagne pour la présidentielle du FN en 2012 ?

Non,
j’avais déjà arrêté de militer depuis un bon moment. Mais j’ai collé les
affiches de Le Pen en 2007.

Comment
regardez-vous le discours politique de l’extrême-droite actuelle ?

J’ai
énormément étudié tout ça depuis quelques années et je vois maintenant une
grande confusion des genres entre un discours qui prétend défendre les petites
gens, les bons Français qui travaillent honnêtement, et le fait qu’on ne parle
que d’insécurité, de montée de l’islamisme etc. au moment où il faudrait
surtout parler d’économie et de salaire, qui est le noeud du problème. Pour
moi, pendant des années, j’ai contribué à créer l’écran de fumée qui protège
ceux contre lesquels je me battais vraiment au fond de mon coeur : les
profiteurs.

Comment
regardez-vous, aujourd’hui, le militant que vous étiez ?

Moi et
les autres on s’est laissé avoir. Il n’y avait pas de travail dans le village,
on était désoeuvré, on avait l’impression d’être inutile et rejetés par la
société. D’ailleurs il ne se passait jamais rien chez nous en terme de
délinquance, et les seuls étrangers étaient les fils de réfugiés espagnols.

Pourquoi
avez-vous demandé qu’on change votre prénom et qu’on ne présente pas votre
photo dans cet article ?

Il est
évident qu’il y aurait des représailles contre moi.

(1) Nom
d’emprunt

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