Rencontre régionale à Montpellier pour un nouveau rassemblement au sein du Front de Gauche,





A
Montpellier, samedi 8 juin, une quarantaine de personnes issues de l’Aude, du
Gard, de l’Heraut et de Lozère, se sont réunies. Etaient représentés les
Alternatifs, la Gauche Anticapitaliste, la Gauche Unitaire, la FASE et des
militant-e-s du FDG sans appartenance partidaire. Avec cette coordination
régionale, il s’agissait de préparer la réunion du 15 juin à Paris, étape du
processus visant à la création d’un regroupement unifié de ces courants au sein
du Front de Gauche. 









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 Rencontre régionale pour un nouveau rassemblement au sein du
Front de Gauche
(pôle rouge et vert, écosocialiste,…) 

Gauche Anticapitaliste / Fase / Gauche Unitaire /
Alternatifs

organisent un processus de rapprochement-fusion pour créer un mouvement politique unifié au sein du front de gauche. 





Compte rendu de la rencontre du 8 juin à Montpellier

A
Montpellier, samedi 8 juin, une quarantaine de personnes issues de l’Aude, du
Gard, de l’Heraut et de Lozère, se sont réunies. Etaient représentés les
Alternatifs, la Gauche Anticapitaliste, la Gauche Unitaire, la FASE et des
militant-e-s du FDG sans appartenance partidaire. Avec cette coordination
régionale, il s’agissait de préparer la réunion du 15 juin à Paris, étape du
processus visant à la création d’un regroupement unifié de ces courants au sein
du Front de Gauche.

La première partie de la discussion a concerné les textes (voir
ci-dessous) sur la situation politique en France et en Europe, les éléments de
réponse programmatiques à apporter sur les questions sociales, écologiques et
démocratiques, le rôle que joue et devrait jouer le Front de Gauche et notre
regroupement en son sein. Il y a eu un large accord sur leur contenu même si
certains auraient souhaité une analyse plus approfondie sur certains points.
Parmi les sujets qui ont fait débat, citons : l’analyse du PS et les
réponses à apporter à la crise européenne au vu des derniers rebondissements.  

La seconde partie a porté sur le fonctionnement du regroupement dans le
cadre du processus de création, à terme (une année), d’un mouvement politique
unifié. Dans l’année qui vient, le mouvement sera composé des organisations
partie prenantes et intègrera des militant-e-s du FDG sans appartenance
partidaire (adhésions directes au regroupement, ce qui n’est hélas pas possible
pour le FDG). Il y a eu accord sur la mise en place à partir de
septembre de comités géographiques unifiant nos forces, d’avoir des outils de
communication commun,  d’aller vers
des collectifs d’animation départementaux également unifiés, d’avoir des modes
de décisions tels que le consensus, sinon une majorité large à 60 ou 66%. Cela même
si dans un premier temps les organisations constitutives continueront
d’exister. La discussion sur un nom commun devrait avoir lieu à l’automne. Un
débat a eu lieu sur le degré d’autonomie des futurs comités locaux et le type
d’instance d’animation à mettre en place.

Trois personnes ont été mandatées pour représenter le Languedoc à la
réunion du 15 juin à Paris. 

PRESENTATION DE LA JOURNEE DE RENCONTRE DU 15 JUIN A PARIS ET DES TEXTES SOUMIS A LA DISCUSSION


Plusieurs organisations du Front de Gauche, dont la Gauche Anticapitaliste, ont entamé un processus de rapprochement. Une nouvelle étape est prévue le 15 juin à Paris, préparée par des rencontres régionales. 

En Languedoc Roussillon, se retrouveront le 8 juin à Montpellier, les Alternatifs, la FASE, la Gauche Unitaire, la Gauche Anticapitaliste et des militant-e-s du Front de Gauche sans appartenance partidaire.


Paris, 15 juin : lançons le
débat national sur notre rapprochement    
Le 15 juin prochain
aura lieu à Paris une nouvelle réunion de travail du processus de rapprochement engagé
par les Alternatifs, Convergence et Alternative, la FASE, la Gauche
Anticapitaliste, la Gauche Unitaire. Gauche Unitaire participera à cette
réunion du 15 juin pour y présenter ses propositions, des militants de GU
porteront leur propre point de vue. R&S considère cette réunion comme un
moment d’échanges et de rencontres.

Cette réunion sera une
étape supplémentaire d’un processus engagé depuis de longs mois déjà.

Elle se veut une
réunion plus large, intégrant les expériences locales de rapprochement. Nous la
voulons pluraliste : nous souhaitons que, au delà des composantes organisées,
participent les militants non-encartés.

Il faudrait dans cette
perspective tenir des réunions locales de préparation de cette échéance.

Nous proposons d’ouvrir
la journée par une discussion générale sur la situation politique, centrée sur
les différents éléments d’analyse qui nous rassemblent.

Cela sera l’occasion
aussi de mettre en avant les expériences de regroupement local d’ores et déjà
engagées.

L’après-midi se
tiendront des commissions de travail sur les différentes parties du texte en
discussion avec un retour en plénière.

Ce texte de référence,
travaillé à partir de contributions des différentes composantes, cherche à
mettre en commun ce qui nous rassemble. Il doit permettre d’engager la
vérification de nos convergences : sur la situation et l’orientation politique
que nous défendons, sur les questions programmatiques, sur quelle force
politique nous nous proposons de construire ensemble.

Après le 15 juin, les
documents de travail discutés seront mis à disposition de tous nos réseaux et
collectifs militants pour enrichissement, amendements, éclairages et débats, en
vue d’une appropriation démocratique à l’automne 2013.

 

Voici les 4 textes en
discussions.

 

Avertissement :

Comme vous pourrez le
constater, les trois documents qui vous sont présentés sont à la fois nourris
et inachevés ! Ils sont le produit d’un travail amorcé en début d’année
entre six composantes du Front de gauche et des animateurs du groupe
« tous ensemble ». Une rédaction collective qui a pris comme méthode
de mettre en commun des productions déjà réalisées par les composantes, des
groupes de travail ont synthétisé et approfondi cette production, deux réunions
nationales se sont tenues en janvier et avril afin de vérifier les
convergences.

Vous avez donc entre
les mains une base de travail nécessairement inachevée. Qui se présente sous la
forme de trois documents :

Une première partie
traite de l’orientation politique et de notre intervention commune dans le
Front de gauche.

Une deuxième développe
les principaux aspects programmatiques de la transformation de la société.

Une troisième s’attache
à définir les bases de la force politique que nous entendons construire
ensemble cet automne.

Dans ces trois
documents quatre questions sont particulièrement développées car elles ont fait
l’objet d’un travail soutenu. Il s’agit de notre intervention dans le Front de
gauche dans la première partie, des parties « Europe » et
« écologie » de la deuxième partie et de la troisième partie dans son
ensemble.

Dans la seconde partie,
un titrage permet de montrer les inégalités de travail et de production mais en
même temps la volonté d’enrichir le texte et donc de rédiger ultérieurement.

Nous entendons
également proposer à la réflexion commune des participant(e)s un document plus
court de quelques pages résumant nos propositions.

A ce stade, ces bases
de travail vous sont proposées par les Alternatifs, la FASE, Convergences et
alternatives, la Gauche Anticapitaliste, les animateurs du groupe « tous
ensemble », des militants de la Gauche Unitaire.

 

Partie 1. Notre
orientation politique 

 

1.1) Une crise, des
crises : menaces sur la civilisation humaine

La montée en puissance
des périls qui menacent la société monde se manifeste par les multiples crises
économique, sociale, écologique, démocratique, géopolitique, étroitement
imbriquées. Nous sommes dans une ère de grands bouleversements, de
réorganisations globales du système économique et des relations
internationales, de reclassements politiques fondamentaux. Cette crise
confronte l’humanité à d’authentiques enjeux de civilisation, qu’il faut
préciser : il s’agit de la combinaison et de la contemporanéité de multiples crises
prenant racine dans des échelles historiques et temporelles très différentes,
ou à travers des références idéologiques, politiques, sociales, et culturelles
très hétérogènes, mais qui ont marqué les peuples, leurs modes de gouvernement,
leur « vivre ensemble », à différents moments de leur histoire.

Ainsi la crise
économique et financière actuelle résulte du dérèglement de la mondialisation
néolibérale telle qu’elle s’est peu à peu imposée comme modèle dans le bloc
capitaliste occidental (circulation totalement libre des capitaux, mise en
marchandise de toute la vie sociale, États mis en concurrence, apparition de
formes proto-étatiques multinationales telles que l’Europe, détruisant les
formes historiques d’« État social », au lieu de favoriser la bonne échelle
de réponse à des questions mondiales comme la crise écologique…) depuis le
milieu des années 1970, en réaction à la phase expansive épuisée de
l’après-guerre.

La domination
impérialiste de quelques États et la domination économique des multinationales
s’enchevêtrent. Des conflits armés ensanglantent bien des pays ou
sous-continents. Les activités criminelles   – trafics d’êtres
humains, de drogue ou encore évasion fiscale – recyclent des sommes colossales
dans le système financier par la porte dorée des paradis fiscaux. Les droits
démocratiques et libertés publiques sont limités y compris en Europe. Les
formes les plus brutales d’exploitation, salariée, domestique, et sexuelle se
maintiennent voire se développent à l’encontre des femmes même si, ponctuellement,
leur situation a pu s’améliorer du fait de l’accès massif au salariat. Nombreux
sont celles et ceux qui sont contraint-es à l’exil pour fuir la misère des
zones rurales et se retrouvent confronté-es à une misère plus grande, à la
surexploitation des grandes métropoles ou des pays dominants. Le développement
des préjugés xénophobes face aux migrant-es est puissamment alimenté par des
discours racistes et des politiques discriminatoires généralisées.

Une nouvelle fois,
l’alternative « socialisme ou barbarie » est d’actualité.

La crise écologique, à
la fois multidimensionnelle et globale, résulte directement de la dynamique
destructrice du capital déchaîné, et d’une accélération sans précédent du
productivisme, nécessaire au capital pour trouver des débouchés à son infinie
et continuelle « production de marchandises ». Le vingtième siècle tout entier,
et surtout sa deuxième moitié, ont été le théâtre du développement de
fulgurants moyens énergétiques, de pillage des ressources naturelles, de destruction
des écosystèmes humains/nature, de fabrication de capacités destructrices
immenses simultanément à la course technologique dont les promesses, positives
ou négatives, sont profondément contradictoires. Cette crise écologique plonge
aussi son origine ancienne dans des rapports humanité/nature bien spécifiques à
la civilisation occidentale et marqués par la domination. Les classes
dominantes se montrent incapables de prendre les mesures qui permettraient
d’enrayer le changement climatique, l’effondrement de la biodiversité,
l’acidification des océans, l’érosion des sols, ou encore la pollution chimique
généralisée, ainsi que la crise alimentaire, la crise du modèle productiviste
agricole, l’artificialisation croissante des sols, l’extractivisme, les pollutions,
l’accumulation de déchets plastiques et autres jusqu’à former un « 7e continent
».

Aux pollutions
atmosphériques, radioactives chimiques et nanotechnologiques croissantes, mais
invisibles, de l’air, de l’eau, des sols, le « capitalisme du désastre » –
adossé à un scientisme meurtrier qui fétichise la  recherche et surtout la
technique – prétend répondre par un impossible « capitalisme vert »,
occasion de développement de nouvelles multinationales et de nouvelles
marchandises (marché carbone, droits à polluer) ou par de pseudo-dispositifs de
« protection», de prétendue dépollution, et par une médecine high tech pour les
privilégiés, tout en exigeant de breveter intégralement le vivant.

La crise est également
une crise démocratique profonde dans les pays occidentaux, exprimée à travers
une abstention électorale grandissante et un rejet massif du système politique,
synonyme de professionnalisation et de carriérisme, de cynisme, de domination
des oligarchies, et de corruption à toutes les échelles résultant des liens de
plus en plus étroits entre les bourgeoisies financières et les élites
politiques et médiatiques.

Les classes dominantes
accentuent la répression contre les mouvements sociaux et toutes les formes de
contestation de l’ordre établi. Ultra-libéralisme économique et criminalisation
des luttes populaires vont de pair, ainsi que le renforcement des pouvoirs
régaliens des États en même temps que la dénonciation du tout-État pour les
droits et les politiques publiques. Les classes dominantes n’hésitent pas à
désigner des boucs émissaires parmi les couches populaires les plus
défavorisées pour justifier leur remise en cause des politiques sociales. Elles
utilisent l’idéologie raciste, identitaire et xénophobe pour maintenir leur
domination.

Pourtant, les moyens du
développement humain, de l’épanouissement, de l’éducation, de l’accès à la
culture, de la préservation et de la valorisation de la biodiversité n’ont
jamais été aussi considérables. Mais ils servent à accroître le poids de la
domination du capital et les champs où elle s’exerce. Les moyens de production
et de communication sont accaparés et détournés par les plus riches, protégés
par les systèmes technocratiques, policiers et militaires, quand ils devraient
construire une citoyenneté mondiale. La propriété n’a jamais été aussi
concentrée en quelques dizaines de milliers de mains alors que des milliards de
femmes et d’hommes n’accèdent pas aux droits fondamentaux.

Enfin, la crise est
géostratégique : la montée en puissance des pays dits « émergents » est pour
les sociétés du Nord le début de la fin d’une hégémonie de cinq siècles, faite
pour partie de pillage et de domination coloniale. L’hégémonie militaire
états-unienne perdure malgré l’émergence d’un monde multipolaire. Mais le
chamboulement des hiérarchies entre blocs d’États, résultant de l’effondrement
de l’URSS, combiné avec la crise du projet d’émancipation humaine (du
socialisme, du communisme, des visées progressistes, des espoirs portés par les
révolutions anticoloniales, etc.) provoquent la résurgence de forces
sociopolitiques ou idéologiques enfouies pendant des décennies :

– Retour en Europe ou
dans l’ex-URSS d’un nationalisme exacerbé fondé sur l’homogénéité ou la pureté
(introuvable) des ingrédients de la nation comme forme historique du « vivre
ensemble »

– Développement de
nouvelles guerres basées sur des affrontements néonationalistes sur fond de
désagrégation sociale et politique (ex-Yougoslavie, empire russe, effondrements
d’États), ou de chocs présentés comme civilisationnels (guerres de Bush au
Moyen-Orient, doublées d’entreprises de nation-building désastreuses), ou de
guerres asymétriques contre des « menaces » non précisément localisables (lutte
antiterroriste), mais réelles. Certains pays, notamment en Afrique, rencontrent
même une conjonction catastrophique de ces différentes tendances : implosion de
l’État laissant le pouvoir à des bandes armées, guerres civiles, dictatures,
menaces terroristes.

–  Retour d’un
intégrisme dans toutes les religions, exutoire à la crise morale générale,
minoritaire, mais très visible et régressif dans un contexte global restant
cependant marqué par la sécularisation.

Résistances sociales et
révolutions

Sur l’ensemble des
continents, jusque dans les pays où les luttes de classe furent longtemps étouffées,
les peuples se dressent et expriment leur aspiration à la justice et à
l’égalité. Après l’Amérique latine, la révolution a resurgi dans le monde
arabe. Les soulèvements de Tunisie et d’Égypte ont évincé deux des dictatures
les plus emblématiques de cette région, et les exigences démocratiques et
sociales qu’ils ont exprimées ont ensuite ébranlé les pays voisins. Ces
révolutions ont montré que même dans le contexte brutal d’une dictature, sur
fond d’une exploitation économique et sociale, un peuple, les peuples peuvent
bousculer l’ordre existant, renverser le pouvoir. Ces soulèvements populaires
manifestent avec éclat la puissance des peuples à changer le cours de
l’histoire.

Les forces de la
contre-révolution n’ont pas tardé à réagir pour tenter de briser une dynamique
à l’effet de souffle redouté par les oligarchies dominantes et les grandes
puissances, mais elles sont loin d’être parvenues à leurs fins.

Sur l’ensemble du
globe, dans des formes diverses, luttes sociales, grèves générales et mobilisations
de rue se conjuguent avec des mouvements massifs de la société comme celui des
« Indignés » pour contester un ordre où 99 % des habitants de la planète
subissent la tyrannie de 1 % de possédants et de boursicoteurs. La trajectoire
du mouvement altermondialiste témoigne de la volonté de nombreuses fractions
des mouvements sociaux de se coordonner et d’élaborer une plateforme et des
méthodes de luttes communes. La difficulté d’impliquer les grandes
organisations syndicales et de déclencher des luttes d’ampleur à l’échelle
internationale demeure cependant un obstacle non surmonté.

L’Europe est ainsi le
théâtre d’un affrontement persistant entre les peuples et les élites
dirigeantes. S’il n’est nulle part parvenu à mettre en échec les prétentions
des possédants, le refus de l’austérité n’en a pas moins fait descendre des
millions d’hommes et de femmes dans les rues. Les gouvernements parviennent
encore à faire passer en force leurs politiques de destruction sociale et de
régression démocratique, la finance réussit même parfois à mettre en place des
équipes ne procédant pas d’une élection, mais leurs marges de manœuvre se
réduisent à mesure que leur autorité s’affaiblit. Toutefois, le mouvement
syndical, le mouvement écologiste ou encore les forces de la gauche radicale
peinent à organiser la résistance face à une bourgeoisie coalisée malgré ses
divisions. Les tentatives de coordination de certaines luttes syndicales à
l’échelle européenne (journées d’action de la CES, transport routier,
cheminots, initiatives liées aux forum sociaux européens…) restent très
difficiles ou limitées dans leurs effets. Une dissymétrie énorme se maintient
entre la centralisation du pouvoir capitaliste et celle du mouvement de
résistance, dans la capacité à transnationaliser l’élaboration des programmes
d’action, et à les populariser dans les espaces nationaux. Le refus des traités
européens libéraux par référendum n’a pas produit de dynamique politique
cumulative, même si la méfiance envers l’Europe s’accroît. Il manque aussi à ces
batailles prometteuses une perspective politique internationale à même de faire
surgir un espoir et de permettre aux mouvements populaires d’arracher des
victoires.

Dans ce contexte, le
risque existe de voir se développer des tendances au repli nationaliste et des
fractures entre les victimes de discriminations racistes et les autres, y
compris dans le monde du travail.

La crise de la gauche
et du projet d’émancipation
 

Les mouvements
d’émancipation traversent une période difficile. La spécificité de la période
actuelle est que la fusion opérée à la fin du 19
e
siècle entre le mouvement réel des luttes de classe et les idées socialistes et
communistes a été désarticulée par 40 ans de contre-révolution néolibérale, de
destruction des collectifs de travail, de recul de la conscience de classe,
entraînant des régressions sociales, politiques et idéologiques.

L’histoire des luttes
populaires n’est pas, pour autant, une simple succession de défaites. Face aux
attaques répétées, des résistances existent et existeront. Il faut se garder de
toute lecture fataliste ou linéaire : de nouvelles formes de subversion, de
lutte, avec la force qui s’en dégage, surgissent ou surgiront et nous devons y
être attentifs afin d’y jouer un rôle actif.

Le meilleur programme
du monde ne sera rien sans luttes et expériences fondatrices. Mais ces
dernières ne surgissent pas du néant : elles mûrissent et s’épanouissent au
travers de la multitude des débats et combats qui peu à peu dessinent le
possible. Nous ne partons pas de rien, mais cependant nous sommes loin d’avoir
toutes les réponses. Il s’agit tout d’abord de montrer que nous sommes capables
de répondre aux grands enjeux auxquels l’humanité est confrontée face à la
multitude des crises qui l’accablent. C’est la possibilité même d’une
alternative socialiste au système capitaliste qu’il s’agit de reconstruire. Les
luttes ont besoin d’un horizon politique qui aujourd’hui a reculé à une échelle
de masse, notamment en Europe.

L’ancien projet
socialiste doit donc être remanié pour être à la hauteur des questions posées,
particulièrement par l’échec des économies administrées et bureaucratisées,
mais aussi par celles que la crise écologique globale a fait surgir et dont les
conséquences menacent la possibilité même de construction d’une autre société,
libre et fraternelle, à l’échelle planétaire.

Cet objectif implique
un remaniement profond des anciens cadres de pensée et d’organisation, dont le
creuset ne peut être contourné ou évacué. Cela demande aussi d’être attentif et
disponible aux nouvelles formes de contestation et d’organisation qui peuvent
émerger. L’intégration des dimensions sociales, écologiques et démocratiques,
dans un même projet de lutte des classes émancipateur, trouvant des
déclinaisons concrètes, en est la condition.

Nous sommes donc dans
une période de recomposition politique et de reconstruction d’une nouvelle
perspective d’émancipation, après les ravages du stalinisme et du réformisme
social-démocrate. Cela suppose de faire la synthèse du meilleur des différentes
traditions du mouvement ouvrier, communiste, socialiste, écologiste,
républicain, les apports issus des luttes sociales et politiques, des
mouvements féministes et pour l’égalité des droits, et de l’ensemble des
progrès sociaux et culturels qui ont émergé.

1.2 ) Eléments sur la
situation française 

L’expérience politique
des alternances depuis 30 ans : depuis 1981, plusieurs formes de
gouvernements ont alterné, dominés par la droite ou par le parti majoritaire à
gauche, le PS. Le grand espoir suscité par 1981, avec des acquis limités mais
réels, s’est évanoui deux ans plus tard avec le choix de l’austérité, déjà à
l’époque imposée par l’Europe capitaliste, et l’acceptation des règles du
marché mondial. Le nouvel espoir, en 1997, de la gauche plurielle résulte de la
mobilisation sociale de décembre 1995, et des années précédentes, porteuse
d’exigences sur les services publics, la protection sociale, la lutte contre le
chômage. Là encore, après quelques décisions emblématiques (35h sabotées par le
patronat faute d’une loi contraignante), le gouvernement plonge dans
l’accompagnement libéral (privatisations à outrance).

Malgré les échecs, la
direction du PS n’a donc tiré aucun bilan vers une réorientation à gauche et,
au contraire, a évolué clairement dans l’accompagnement du capitalisme :
campagne avec la droite pour le traité constitutionnel de 2005, horizon
capitaliste accepté comme non dépassable, refus de l’ancrage de classe du
projet politique (Terra Nova). C’est le social-libéralisme : un pari de
compromis avec le capitalisme (transformé en gestion pure et simple au
gouvernement), tempéré dans un donnant-donnant avec certaines directions
syndicales, autour de pseudo-réformes déjà anticipées par les technocrates du
système (exemple : fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, accord
ANI, etc.).

L’évolution du PS a
coïncidé (années 1980) avec son hégémonie sur l’ensemble de la gauche comme
force d’alternance face à la droite. C’est une logique de mutation en parti
démocrate (ou du centre) qui est à l’œuvre. Mais celle-ci est contrecarrée par
les éléments de fidélité au passé socialiste et par la radicalité maintenue
dans la société qui se manifeste dans les grandes mobilisations sociales
périodiques. De ce fait le PS se trouve confronté à une contradiction forte : sa
politique génère une distanciation croissante avec les classes populaires,
alors que le vote de ces dernières reste un élément déterminant de sa force
électorale pour accéder aux responsabilités.

La droite veut
gouverner par elle-même. Le constat de la dérive du PS n’efface pas, même
s’il le modifie, une autre donnée de la vie politique : la
bourgeoisie reste indéfectiblement attachée à des modes de gouvernement directs
de son propre personnel politique. Dans ce cadre, la présidence Sarkozy est
celle qui est allée le plus loin et qui était la plus cohérente pour incarner
les besoins du capitalisme de notre époque : défaire les acquis sociaux
issus d’un siècle de mobilisations, briser la gauche en faisant semblant de
préempter ses valeurs, décourager le mouvement social et effacer Mai 68 comme
moment fondateur, tisser des liens avec l’électorat de la droite extrême pour
anéantir la conscience de classe, rogner la laïcité, accroître les pouvoirs
régaliens. Cependant, cette politique a été mise à mal par un sursaut populaire
(2010) redonnant vie à un besoin d’alternative de gauche, déjà manifesté dans
les élections intermédiaires (régionales). Dans ces conditions, la
fonctionnalité du PS, déjà maître des institutions locales ou régionales,
reprend du poids pour traduire une exaspération populaire en succès électoral
et institutionnel. Il en est ainsi tant qu’une véritable alternative à cette
puissance politico-institutionnelle n’est pas apparue sur la scène politique.
Une telle alternative peut naître ou prendre racine dans les mobilisations,
mais elle ne peut se consolider ou se stabiliser nationalement que si elle
s’incarne dans une force politique.

La polarisation
droite/gauche reste donc, en dépit des confusions et des reculs, une donnée
structurante de la vie politique et demeure, même de manière très déformée, une
réfraction de l’affrontement de classes. Se maintient en effet dans la durée
une « polarisation », un potentiel de radicalité politique en France,
qui puise ses racines jusque dans la Révolution française, potentiel que les
néoconservateurs et le patronat veulent précisément détruire. Y renoncer (par
exemple parce que des personnes votent Front de gauche sans adhérer aux repères
droite/gauche) serait prendre le risque de reculer encore plus quant à la
nécessaire reconstitution d’une conscience politique plus acérée. 

Il est certain que ce
n’est pas d’abord par adhésion au programme du PS que le peuple de gauche vote
pour lui (ou s’en détourne), car l’expérience catastrophique des alternances
est maintenant partagée par une fraction importante de la population. C’est
cette lucidité populaire qui ouvre un espace pour une nouvelle donne politique,
pour peu que le rassemblement se construise nationalement autour d’une gauche
crédible et attractive, comme la victoire de 2005 l’avait montré.

Le défi pour la gauche
de transformation sociale est donc d’échapper à l’alternative mortelle de la
soumission au PS par réalisme, ou la dénonciation impuissante. L’objectif doit
être de prendre l’exacte mesure de l’hégémonie du PS pour la combattre
concrètement. Il convient de rompre avec l’illusion que cette hégémonie serait
le produit de sa politique, et non de la place qu’il occupe dans le système de
pouvoir.

L’alternative possible.
C’est à la lumière de ces constats qu’il faut analyser ce qui s’est produit en
2007 et 2012 dans les élections présidentielles. En 2007, il n’y avait pas de
dynamique à gauche entre le PS et une alternative de gauche éclatée après sa
victoire de 2005. En 2012, le peuple de gauche s’est remobilisé parce que
Hollande a été contraint, pour gagner, de retrouver des accents de gauche qu’il
n’avait pas anticipés (contre la finance, pour la justice sociale, pour
renégocier le traité Merkozy), et parce qu’à sa gauche, le Front de gauche
incarnait une polarisation efficace précisément sur ces questions, avec la
claire volonté de battre la droite.

Hollande s’est très
vite recadré sur le fond de son projet propre : accepter les diktats de la
troïka, cajoler le patronat (compétitivité) en espérant que celui-ci
accompagnerait une relance. Mais la crise Cahuzac révèle que derrière
l’acceptation des règles néolibérales, toutes les dérives sont possibles. Dès
lors, il ne reste plus rien pour stabiliser le pouvoir.

La remobilisation
populaire et majoritaire à gauche en 2012 est donc très fragile, elle peut se
volatiliser vite, et ouvrir ainsi une brèche béante au FN. En ce sens, il y a
bien une course de vitesse. Mais il s’agit d’une course de vitesse pour
consolider la conscience de gauche, pas pour s’épuiser dans une guerre des
extrêmes, attisée par les médias, et qui profiterait à la force qui joue le
plus sur les confusions. Ayant été une composante indispensable de la majorité
populaire qui a chassé Sarkozy et la droite, le Front de gauche est légitime pour
engager une bataille pour ravir l’hégémonie au PS en s’adressant à toute la
gauche, pour tendre la main aux secteurs critiques, organisés ou non, et
préparer les conditions d’une relève majoritaire.

1.3) Le Front de
gauche, pour changer les rapports de force et gouverner à gauche pour
rompre avec l’austérité.

Le Front de gauche a
franchi une étape en 2012. La campagne présidentielle a permis d’entrevoir la
possibilité d’une jonction entre des solutions politiques à gauche et les
mobilisations populaires (résultats électoraux, rassemblements massifs de la
Bastille, du Prado, présence de secteurs en lutte). Les législatives ont été
plus difficiles, dominées par la logique institutionnelle qui réduit l’enjeu à
donner une majorité au président élu et à écarter la droite. Et il n’était pas
encore en mesure de rendre crédible et possible, dès ce moment-là, une
alternative à celle proposée par le PS.

Mais le fait politique
principal, c’est l’installation, par le Front de gauche, d’une autre
perspective à gauche. Des répliques de la force affirmée dans sa campagne du
premier tour ont eu lieu : dès septembre 2012 avec la manifestation contre
la ratification du traité européen, en 2013 avec la campagne « une alternative
à l’austérité, c’est possible ! » et  la marche du 5 mai. Ces exemples
indiquent une voie d’action et de propositions en dehors des échéances
électorales et nourrissant celles-ci.

Mais cela ne saurait
suffire. Le Front de gauche doit viser à faire prévaloir, au sein d’une gauche
traversée par deux orientations inconciliables, une autre politique que celle
mise en œuvre par le gouvernement et la direction du Parti socialiste. C’est
une réorganisation et une recomposition d’ensemble de la gauche que nous
visons, autour d’une ligne de partage entre adaptation aux logiques libérales
et volonté de rompre avec elles, un débat qui traverse l’ensemble de la gauche
et du mouvement social

Un Front de gauche
indépendant

Le choix du Front de
gauche de ne pas participer au gouvernement Ayrault a été une décision importante.
Le Front de gauche se considère comme partie prenante de la dynamique populaire
majoritaire qui a chassé la droite et N. Sarkozy, mais il est indépendant de la
majorité présidentielle et gouvernementale qui met en œuvre les 60 propositions
de François Hollande. Pour la première fois sous un gouvernement de gauche, il
existe à gauche une force politique rassemblée, unitaire, autonome et
indépendante, disponible pour porter les exigences populaires et résister aux
pressions du Medef et des marchés. Une force déterminée à rassembler des
majorités à gauche, dans le mouvement social, au Parlement, autour de
propositions de lois actant de nouvelles avancées pour le mouvement populaire.
Dans la phase actuelle de perte massive de légitimité du gouvernement Hollande-Ayrault,
il est de plus en plus urgent que le Front de gauche prenne des initiatives
pour imposer à gauche une véritable alternative politique majoritaire, en
opposition à celle du gouvernement.

Rendre crédible la
perspective d’une autre majorité et d’un autre gouvernement à gauche

Le Front de gauche doit
inscrire ces batailles immédiates dans la construction indispensable d’une
politique alternative à l’austérité, celle que devrait mettre en œuvre une
majorité et un gouvernement vraiment à gauche. Le Front de gauche doit être
candidat à une majorité et à un gouvernement anti-austérité, rompant avec les
logiques libérales et productivistes, pour contrôler le système financier,
étendre les pouvoirs, les droits et la démocratie pour les salariés et le peuple.

Pour cela, le Front de
gauche doit agir pour changer les rapports de force au sein de la gauche, pour
créer les conditions qui rendent possible l’émergence d’une autre majorité et
d’un autre gouvernement. Tout est à faire pour engager un vrai changement, et
ne pas laisser la place à la démobilisation et à l’abstention favorisant un
retour d’une droite flanquée d’une extrême droite candidate au pouvoir. Il
faut  donc travailler à dresser les contours de ce que pourrait être cette
nouvelle majorité au sein de la gauche et dans le mouvement social. Un
gouvernement issu de cette majorité s’appuierait en permanence sur de
puissantes dynamiques populaires, indispensables à la transformation immédiate
des conditions de vie du plus grand nombre. Cette perspective d’un gouvernement
de rupture avec l’ordre libéral devra s’affirmer en convergence avec des
projets similaires dans d’autres pays, notamment en Europe, pour engager de
nouvelles conquêtes collectives.

Le Front de Gauche doit
chercher à engager la constitution de rassemblements les plus larges possibles,
temporaires ou permanents, sur la base d’objectifs limités mais rassembleurs,
avec les organisations syndicales et associations, avec la volonté de regrouper
tous ceux qui à gauche, et au-delà du Front de gauche, du côté du PS ou d’EELV,
ou de l’extrême gauche, sont prêts à agir. S’il ne considère pas être le seul à
porter les résistances et l’alternative, le Front de gauche jouera pleinement
son rôle s’il est capable de convaincre autour des mesures alternatives qu’il
défend dans un va-et-vient entre ces résistances et le terrain législatif et
politique.

« Place au peuple », «
Prenez le pouvoir », ce ne sont pas que des slogans électoraux, mais des
perspectives qui doivent nourrir le projet du Front de gauche.

Agir par  des
campagnes politiques régulières

Le Front de gauche
n’est certes pas à lui seul la représentation politique des radicalités et du
mouvement social. Bien au contraire, il doit défendre une conception qui refuse
l’établissement de rapports de subordination du mouvement social, syndical,
associatif, derrière toute force politique qui se prétendrait le « débouché »
ou « l’avant-garde ». Les mouvements sociaux sont aussi producteurs de
propositions et de réponses politiques, et doivent rester maître d’œuvre dans
l’organisation directe de l’action sociale, sans être  sommés de se
rallier aux initiatives des forces politiques.

Avec cette orientation,
des campagnes prolongées doivent être engagées:

– Contre l’austérité.
Refuser les contraintes fixées par l’Union européenne pour généraliser
l’austérité, en luttant pour désobéir aux injonctions de la Troïka (UE, FMI,
BM) qui veut empêcher tout écart à l’orthodoxie libérale. Une campagne qui
trouvera son prolongement, en France et en Europe, aux élections européennes.

– Pour l’emploi.
Légiférer pour empêcher la vague de licenciements et la montée du chômage
orchestrée par le Medef : loi d’interdiction des licenciements dans les
entreprises qui versent des dividendes à leurs actionnaires, préemption sur les
entreprises pour la reprise d’activités viables, droits des salariés de
s’opposer aux plans « sociaux », droit de reprise par des coopératives
ouvrières pour conserver les emplois, les activités, les projets sociaux et
écologiques, relance d’une campagne forte pour une réduction massive du temps
de travail… 

– Pour l’appropriation
sociale et démocratique. Soutien aux exigences des syndicats et des salariés
qui demandent un contrôle public ou une nationalisation de leur entreprise. En
soutenant la convergence des luttes des salariés dans les entreprises menacées,
le Front de gauche cherchera à convaincre qu’il y a une alternative à
l’impuissance affichée par le gouvernement.

– Pour l’égalité des
droits, contre toutes les discriminations et oppressions.

* Contre le racisme et
la xénophobie : pour le droit de vote des étrangers aux élections locales,
le Front de gauche devra mobiliser avec toute la gauche prête à ne pas reculer,
pour gagner cette extension des droits promise par le candidat François Hollande ;
refuser les reculs du ministère de l’Intérieur qui se met dans les pas de ses
prédécesseurs sur les contrôles au faciès ou les expulsions de Roms…

* Pour l’égalité
femmes/hommes : défendre la proportionnelle intégrale et la parité à
toutes les élections, porter une loi antisexiste afin de condamner les
discriminations et insultes à caractère sexiste, une loi-cadre et des campagnes
nationales contre les violences faites aux femmes, promouvoir une culture de
l’égalité à l’école, favoriser la mixité des métiers, combattre le temps
partiel subi, introduire des sanctions pour non-respect de l’égalité salariale
femmes/hommes, remettre à l’ordre du jour la réduction du temps de travail,
créer un service public de la petite enfance, porter une réforme des retraites
qui compense les inégalités, garantir l’effectivité et la gratuité du droit à
la contraception et à l’interruption volontaire de grossesse.

* Contre l’homophobie
et pour l’égalité des droits d’alliance et reproductifs quelles que soient les
orientations sexuelles, il y a urgence à développer la mobilisation pour le
mariage pour toutes et tous, pour faire reconnaître les droits du second parent
quel que soit le couple, pour créer un statut pour reconnaître les droits des
tiers dans les familles (homoparentales comme hétéroparentales recomposées).

– Briser la dictature
de la finance, prendre des mesures législatives pour un secteur public bancaire
et un contrôle public sur les banques, pour s’émanciper des marchés financiers,
pour que la BCE prête directement aux États. Exiger à la fois un audit de la
dette et un moratoire conduisant au non-paiement des intérêts des dettes
indues ;

– Engager la transition
écologique, réorienter dès maintenant l’investissement public et l’emploi vers
des solutions écologiques dans les énergies renouvelables, les transports, le
logement, l’eau. Revenir à une maîtrise 100 % publique des entreprises du
secteur de l’énergie. Engager un débat démocratique national sur la transition
énergétique et organiser un référendum sur la sortie du nucléaire. Refuser les
OGM et l’exploitation des gaz de schiste. Programme écologique global
d’économies d’énergie, la relocalisation d’activités économiques, une
agriculture paysanne, le développement d’une agriculture biologique accessible
à toutes et tous.

Nous voulons et pouvons
gagner, sans attendre, plusieurs avancées sur la base de campagnes de ce type
appuyées sur les mobilisations sociales. Les campagnes et actions du Front de
Gauche seront des points d’appui pour illustrer et construire cette alternative
de gouvernement, changer les rapports de force au sein du mouvement populaire
et gagner l’hégémonie sur une telle orientation à gauche.

Construire une
perspective de Front de gauche au niveau européen

La crise du
capitalisme, celle de la construction ultralibérale de l’Union européenne, les
solutions catastrophiques engagées par la Troïka, les dérives des gouvernements
sociaux libéraux acceptant de gérer ces plans d’austérité ont provoqué de
puissants mouvements sociaux de résistance, et redonné de l’espace et de la
force aux gauches antilibérales européennes, plus crédibles, porteuses
d’ambitions plus affirmées. On l’a vu plus en Grèce, en Espagne, au Portugal,
la combinaison de mouvements sociaux importants et de coalitions de gauche liées
à ces mouvements permet des progrès politiques notables dans la prise de
conscience qu’une autre politique est possible en Europe.

Les élections
européennes en 2014 seront l’occasion d’affirmer dans plusieurs pays, dans une
même campagne, une même gauche de transformation sociale, défendant des
solutions politiques communes, (banque publique, refus du Traité, alignement
vers le haut des législations sociales et fiscales, démocratie européenne…).
En lien avec le Parti de la gauche européenne, nous pourrons ainsi faire
apparaître une coalition de ces gauches européennes, car n’y aura pas
d’alternative à la crise si elle est pensée à l’échelle d’un seul pays.

Approfondir la
stratégie du Front de gauche

Tout en conservant la
démarche du consensus, laissant en débat ce qui n’est pas encore collectif, il
est nécessaire d’engager dans tous les lieux militants du Front de gauche une
démarche d’enrichissement de son programme : la  question de
l’appropriation sociale, les nouveaux droits pour les salariés concernant la
reprise de leur entreprise, ou encore l’approfondissement du débat sur la
transition écologique.

Pour avancer,
l’essentiel est de reconnaître que nous cherchons à élaborer un programme basé
sur une perspective d’action et de transformation, la diversité des cultures
politiques servant la dynamique de l’ensemble.

Le nouveau texte
stratégique adopté début 2013 par le Front de gauche, représente une avancée
collective dans la redéfinition de nos propositions, de l’issue politique
gouvernementale pour sortir de la crise, de nos rapports aux autres forces de
la gauche. Il doit permettre d’avancer vers un véritable Front politique,
social et populaire, qui s’appuie sur les mobilisations sociales, seul à même
d’assumer la confrontation nécessaire avec les classes dominantes, dans les
luttes et dans les urnes.

Le Front de gauche, un
rassemblement ouvert, rassemblant des organisations et permettant l’engagement
individuel, pour créer une dynamique citoyenne

Quelles que soient les
limites de sa construction initiale, le Front de gauche est aujourd’hui un
cadre politique incontournable. Il s’agit désormais de faire force politique
ensemble pour gagner la majorité à gauche, pour cela, l’élargissement du Front
doit être recherché en permanence.

Le processus de rassemblement
ne doit jamais être figé. Toutes les forces d’une gauche de transformation ne
se trouvent pas encore dans le Front de gauche, elles existent au sein d’EELV
et du PS, et dans l’extrême gauche parmi de nombreux militants de ces partis,
dans les associations, les syndicats, les quartiers populaires. Les courants et
organisations qui s’inscrivent dans la gauche de transformation doivent pouvoir
prendre place dans le Front de gauche s’ils le souhaitent.

Mais le Front de gauche
doit aller au-delà du rassemblement des seuls partis politiques, et permettre
aux acteurs engagés dans les mouvements sociaux de trouver une place pour
traduire leurs combats quotidiens sur le terrain politique. Il doit être aussi
un lieu de rassemblement populaire, pour combattre la résignation et le repli
sur soi, pour réduire la coupure entre les milieux populaires et les formes
actuelles d’action politique. Un de ses objectifs doit être de devenir un lieu
de solidarité permettant aux jeunes et aux salariés de s’organiser pour défendre
leurs aspirations et reconstituer une conscience et une culture politique.

Le Front de gauche,
après avoir adopté un texte sur son « fonctionnement et développement», 
peut franchir une nouvelle étape en partant de deux constats :

– la volonté de certains
partis de se maintenir comme organisations spécifiques, avec la souveraineté
sur leurs décisions ;

– le constat que
beaucoup de citoyen-ne-s engagé-e-s avec le Front de gauche ne souhaitent pas
adhérer à une organisation politique tout en voulant être pleinement
acteur/trice de la vie du rassemblement politique.

Il faut maintenant
engager et expérimenter des formes de participation citoyenne collectives. Sous
des dénominations diverses, des « assemblées citoyennes » se pérennisent, des «
collectifs citoyens » se construisent, des « comités populaires » se
développent. Parfois ils se créent en association locale du Front de gauche, à
laquelle on peut adhérer et être partie prenante des discussions et décisions
d’action.

C’est la condition
essentielle pour que le Front de gauche se transforme, pour qu’il soit à la
hauteur de ses responsabilités. Cela ne signifie ni la dislocation des
composantes dans un nouveau « parti », ni qu’il faille être d’accord sur tout,
ni que des initiatives propres à telle ou telle organisation soient
impossibles. En sens inverse, aucune des personnes ne se reconnaissant pas dans
une organisation ne doit avoir le sentiment qu’elle est le jouet de structures
bien rodées.

Dès lors, il peut être
composé, à égalité de dignité, d’organisations constituées (partis et
mouvements) et de structures localisées (assemblées citoyennes ou autres) où
des personnes ont la possibilité d’adhérer directement.

Plus précisément, il
s’agit de mettre en œuvre ce qui a fait accord entre tous :

 – un Conseil
national et une coordination hebdomadaire élargis à de nouvelles personnalités
issues du mouvement social et non-membres de partis ;

– des « Fronts
thématiques » pour donner au Front de gauche les moyens d’intervenir dans tous
secteurs de la vie politique et sociale.

– des moyens de
communication collectifs (site internet géré collectivement, publication
régulière) en appui aux collectifs locaux ;

– des réunions
nationales, sous la forme de « convention » ou d’« assises » rassemblant les
divers espaces du Front de gauche (Assemblées citoyennes, Fronts thématiques,
Conseil national et Coordination nationale).

 

Partie 2. Notre
travail d’élaboration programmatique pour un projet émancipateur

Des convictions
programmatiques partagées …

Des résistances contre
l’exploitation et les oppressions, jusqu’à la lutte pour des gouvernements de
rupture engageant la transformation sociale et écologique, est posée la
nécessité de penser en positif un projet de société alternatif au capitalisme
et au productivisme. Malgré les blessures que portent les mots hérités du
passé, nous avons besoin de refonder un nouveau projet émancipateur : reprenant
le meilleur des utopies socialistes, communistes, écologistes,
autogestionnaires, pour une société fondée sur les valeurs de la démocratie, de
l’égalité, du féminisme, de l’autogestion

Un projet pour libérer
toutes les potentialités de l’auto-émancipation et des aspirations à l’égalité,
pour engager une appropriation sociale des moyens de production et d’échange,
pour une autogestion la plus étendue et un contrôle sur l’outil de travail et
sur le travail lui-même. Il devra revenir sur le bilan et les échecs des
expériences passées, tant du stalinisme que de la social-démocratie, et des
dégâts qu’ils ont provoqués.

Cette élaboration
stratégique devra être le fait d’un travail mené avec d’autres courants que les
nôtres et qui sont engagés, avec nous, dans la construction d’une alternative à
gauche. Et nous voulons également travailler à partir des contributions issues
du mouvement social, syndical, altermondialiste, afin d’ élaborer un projet
d’émancipation sociale adapté aux coordonnées de la période.
       
           

Mais une formation
politique commune se doit de donner à voir un projet de plus long terme, une
culture politique d’émancipation, indispensable à la vie d’un tel mouvement
politique qui, pour donner confiance dans son projet immédiat, a besoin de
faire vivre l’espoir qu’ « un autre monde est possible ».

La question n’est donc
pas de conclure ce débat, ou de résoudre les questions posées, comme autant de
préalables avant d’engager la construction d’une organisation commune. Elle est
de fixer comme objectif à notre formation commune d’être le lieu où cette
élaboration est possible et engagée sérieusement. C’est d’autant plus impératif
qu’elle rassemblera des courants aux histoires et références culturelles
différentes, et pour que cette diversité soit une richesse évitant de tomber
dans l’uniformité idéologique issue d’une même tradition militante, elle doit
se donner ce débat comme objectif permanent.

Pour approfondir les
perspectives d’une gauche de transformation sociale et écologique, les
principales questions autour desquels nous voulons avancer sont les suivantes :

2-1. Pour une Europe
sociale, démocratique et écologique, affranchie des traités libéraux

Nous luttons dans
l’Union européenne, pour une Europe sociale et démocratique, une alternative de
gauche assumant une rupture avec la construction libérale de l’Union européenne
sans accepter les replis nationalistes.

Si, en 2012, par le
moyen de dispositifs exceptionnels et d’un certain assouplissement des règles
d’intervention de la Banque centrale européenne, les classes dirigeantes sont
parvenues un temps à éloigner la menace de l’éclatement de la zone euro, la profonde
instabilité de cette dernière demeure. Sous l’effet de la contraction de
l’activité que provoquent les politiques d’austérité, l’ensemble de «
l’euroland » est marqué par la récession.

La Grèce s’est vue
littéralement saignée à blanc par les ajustements budgétaires, les
privatisations et la liquidation des mécanismes de protection sociale que lui a
imposés la « Troïka ». L’Espagne, le Portugal, l’Italie sont, à leur tour,
menacés par les mêmes phénomènes de récession et de régression qui peuvent à tout
moment les conduire au chaos. L’asphyxie économique de nombreux pays, provoquée
par les coupes budgétaires imposées par le nouveau traité européen, se conjugue
au chômage de masse, qui conduit à l’explosion de la misère et de la précarité.
Face à quoi les politiques d’austérité enclenchent une dynamique infernale : la
contraction de l‘activité engendre la diminution des recettes fiscales,
approfondissant ainsi les déficits et la dette, ce qui place les États sous la
menace permanente des offensives spéculatives des marchés financiers, laquelle
appelle de nouveaux plans d’austérité qui ne feront qu’aggraver le mal auquel
ils prétendent remédier…

En fait, les fragilités
du système bancaire peuvent, à n’importe quel moment, plonger la zone euro dans
une nouvelle tourmente. On le devine en Italie et en Espagne, où les «
mécanismes de stabilité » financiers imaginés par les dix-sept États
membres, ne semblent pas en mesure de faire face à une conjoncture
cataclysmique. Surtout, au fil des sommets, apparaît une divergence explosive
entre deux Europe : celle emmenée par les classes dirigeantes allemandes, qui a
jusqu’alors pleinement bénéficié du modèle économique et social imposé à
l’ensemble de la zone euro, et plus largement à toute l’Union européenne ; et celle
des pays du Sud dont les gouvernements ont de plus en plus de difficulté à
assumer la doxa austéritaire, n’ayant plus les moyens, sur fond de récessions
longues et de chômage de masse, de faire accepter aux peuples des logiques de
sacrifices sociaux sans fin.

En Europe, les classes
dirigeantes veulent en finir avec les acquis populaires

Au regard du reste du
monde, les conquêtes sociales et démocratiques issues des luttes du mouvement
ouvrier en Europe demeurent fortes. Mais, elles apparaissent aux yeux des
classes dominantes du continent comme une anomalie à éradiquer. Il s’agit de
profiter au mieux du grand remaniement mondial engagé avec l’émergence de
nouvelles puissances capitalistes en Asie et en Amérique du Sud, mais aussi de
tenter de faire payer le coût de la nouvelle phase de la crise économique
ouverte en 2008 aux salarié-es et aux pauvres.

Les bourgeoisies
européennes utilisent les institutions de l’UE dans un processus de destruction
méthodique des acquis économiques, sociaux et démocratiques. La troïka
BCE/FMI/Commission européenne, avec l’appui de gouvernements de droite, sociaux
libéraux ou autoritaires, impose dans toute l’Europe une austérité d’airain et
sème la misère afin de restaurer les taux de profits.

La crise est l’occasion
d’une vaste attaque concertée contre les droits des travailleurs/euses selon
des modalités proches dans tous les pays européens. Partout, il s’agit de
remettre en cause le droit du travail, la hiérarchie des normes basée sur le
principe de faveur, les protections offertes par le contrat à durée
indéterminée.

La France est à bien
des égards un lieu emblématique de ce combat entre classes. Ces dernières
décennies   les classes dominantes ont infligé une accumulation de
défaites partielles aux classes populaires sans pour autant parvenir à imposer
une défaite majeure et durable, qui demeure son objectif.

Nous le savons
cependant, pas plus qu’hier face à la mondialisation du capital, la réponse à
une crise globalisée ne proviendra du seul cadre des nations. L’Europe peut
être un cadre pertinent pour affronter les défis colossaux du moment. À
condition qu’elle rompe résolument avec une construction qui discrédite, dans
la conscience des peuples, l’idée européenne elle-même.

Nous devrons œuvrer à
définir les contours d’une construction européenne démocratique, écologique et
solidaire, basée au niveau national comme au niveau européen sur le respect de
la souveraineté populaire. Pour une Union européenne qui soit au service des
peuples et non de la finance.

Nous avons besoin d’une
Europe qui s’émancipe des traités synonymes de destruction des droits sociaux
et de régression démocratique, à commencer par le traité de Lisbonne. D’un
bouclier social, qui protège le monde du travail des effets de la crise. D’une
Europe de l’interdiction des licenciements et des délocalisations, du Smic
européen, du retour au service public. D’une Europe qui mette fin à
l’indépendance de la Banque centrale, afin de disposer des moyens de réorienter
l’économie. D’une Europe de l’harmonisation sociale et fiscale par le haut.
D’une Europe dont la politique agricole commune prenne le parti de
l’agriculture paysanne contre les multinationales de l’agroalimentaire. D’une
Europe du respect et de l’extension des droits des femmes, à commencer par le
droit à disposer de leur corps, donc de l’Europe d’une laïcité reconquise afin
de soustraire le continent à l’influence de ce nouvel obscurantisme qui, depuis
le Vatican, excommunie à tout-va. D’une Europe de l’égalité des droits pour
tous ses résidents, et singulièrement de la régularisation des sans-papiers.
D’une Europe de la démocratie, non celle de petits cénacles qui agissent, au
nom de l’oligarchie, en toute opacité, mais celle des peuples décidant
souverainement de la construction politique qu’ils veulent pour eux. D’une
Europe de la paix et du co-développement, renonçant aux ingérences
impérialistes et néocolonialistes, et qui sorte de l’Otan,

La transformation
sociale, si elle peut s’amorcer à l’échelle d’un pays, ne peut s’envisager de
façon durable et aller à son terme sans susciter une dynamique à l’échelle
internationale. C’est particulièrement indispensable dans une Europe enfermée
par le néolibéralisme dans une spirale d’austérité et de régression
démocratique. Il n’y aura pas de refondation de l’Europe sans une révolution
démocratique qui brise la dictature de la finance, redéfinit le projet européen
en met la participation populaire au coeur de ce projet. À l’heure où les
rivalités entre États s’exacerbent et menacent d’éclatement le processus de construction
européenne, la proposition d’une assemblée constituante européenne, faite par
un gouvernement qui engagerait une politique de rupture avec le libéralisme,
serait entendue par les peuples.

Nous situons notre
combat dans le cadre d’une stratégie politique européenne, dans la construction
d’un rapport de force de solidarité entre les peuples en Europe pour résister
ensemble aux marchés et travailler à des alternatives politiques communes pour
la refondation d’une Europe sociale, démocratique, écologique.

Un gouvernement de
rupture avec le libéralisme, plutôt que d’opter pour une sortie de l’UE et de
la zone euro qui renverrait chaque peuple à lutter chacun dans son seul pays
face aux mêmes logiques capitalistes, devrait travailler à la convergence de
politiques de désobéissance vis-à-vis des traités européens et des choix de la
Troïka. Une convergence de plusieurs gouvernements et de mouvements assumant
une crise dans la construction européenne actuelle pour imposer sa
réorientation est loin d’être utopique. Les mouvements des peuples sont bien
là, ce sont des Indignés, des vagues de grève, des manifestations de masse, des
dynamiques autogestionnaires, notamment en Grèce, en Espagne, au Portugal… Ce
sont aussi les possibilités, comme on l’a entrevu en Grèce, d’accession d’une
majorité de gauche sur une orientation de refus de la politique d’austérité de
l’UE.

Le choix de Syriza,
s’il arrivait au gouvernement, de mettre en place une politique pour sortir de
la crise en s’émancipant des exigences austéritaires, quitte à entrer en
conflit avec l’Union européenne, ne s’est pas accompagné d’une volonté de
sortir de l’euro. Même s’il faut l’envisager et s’y préparer au cas ou l’UE
voulait et trouvait les moyens d’en exclure la Grèce, alors qu’aucune procédure
n’existe pour exclure un pays de l’UE, le choix de Syriza d’en appeler à la
désobéissance aux traités, à une solidarité continentale des peuples et des
gauches autour d’un refus de la dette, des diktats de la Troïka, porte l’espoir
d’une dynamique contagieuse pour une convergence anti-austéritaire. Le retour
aux monnaies nationales et au protectionnisme, outre qu’il aggraverait la
situation de crise du pays qui l’engagerait, accentuerait les divisions
nationalistes entre les peuples et les détournerait plus sûrement de la cause
fondamentale de la crise : la propriété capitaliste, les politiques libérales.
Si un ou plusieurs gouvernements européens ne basent pas leur politique sur une
volonté de sortir de l’euro, ils ne devront pas pour autant reculer devant la
possibilité qu’une majorité de gouvernements européens, hostiles à leurs choix
de sortir de l’impasse austéritaire, provoquent un éclatement de la zone euro.
Ils devront maintenir une orientation monétaire et économique alternative aux
choix libéraux et monétaristes, et envisager toutes les coopérations possibles
pour une refondation européenne.

Il est d’autant plus
urgent d’engager une convergence européenne vers le haut, vers l’avènement
d’une gauche européenne, vers la nécessité qu’un ou deux pays s’engagent
ensemble et s’épaulent comme points d’appui pour provoquer la crise du modèle
européen et y apporter des solutions de politiques alternatives.

Il n’y aura pas de
refondation de l’Europe sans une révolution démocratique qui brise la dictature
de la finance, qui redéfinit le projet européen en mettant la participation
populaire au coeur de ce projet. À l’heure où les rivalités entre États
s’exacerbent et sont menacés d’éclatement, la perspective d’une assemblée
constituante européenne serait une proposition qu’un gouvernement qui
engagerait une politique de rupture avec le libéralisme pourrait faire entendre
avec force.

2.2 Pour l’émancipation
individuelle et collective

Cette première partie
n’est pas encore travaillée, sont indiquées les questions qui seront
développées ici :

– La convergence des
combats contre toutes les formes d’oppressions et de domination

– L’exigence féministe

– Le combat contre la
xénophobie et l’extrême droite

– Libérer la culture et
l’information de la marchandisation

– L’école et
l’éducation populaire

– Contre les inégalités
territoriales, pour le droit à la ville

– L’exigence de
reconstruction d’une perspective émancipatrice contre toutes les oppressions,
l’ancrage dans tous les mouvements pour l’égalité, contre toutes les formes de
racisme, de xénophobie, de discrimination sur la base des origines, du genre,
de l’orientation sexuelle, des croyances, et le respect des libertés
individuelles et de la laïcité.

– L’exigence féministe,
la lutte contre la domination masculine et le patriarcat, partie prenante de
tout projet progressiste et de l’exigence démocratique d’égalité en droits
entre homme et femme, et ses implications dans la remise en cause du
capitalisme de par la place qu’il assigne aux femmes au travail et dans la société.

– Une dimension
internationaliste permanente ; ici même, dans la solidarité avec les immigrés,
dans l’extension des droits civiques et sociaux sur la base d’une citoyenneté
de résidence. Dans l’Union européenne, pour une Europe sociale et démocratique,
une alternative de gauche pour rompre avec la construction libérale de l’Union
européenne tout en combattant les replis nationalistes. À l’échelle du monde,
pour une politique solidaire entre les peuples, sans céder aux « raisons
d’États » et aux politiques de grande puissance, y compris celles de l’État
français. Une politique basée sur le droit à l’autodétermination des peuples
victimes d’oppressions néocoloniale, d’exploitation impérialiste, de
destruction de l’environnement par le pillage des ressources naturelles. Une
politique de paix et de désarmement, notamment le désarmement nucléaire
unilatéral, contre les guerres. Cette dimension internationaliste permanente
s’incarne en particulier dans l’engagement altermondialiste et la participation
active au processus des forums sociaux à toutes les échelles, des forums
sociaux locaux au Forum social mondial : c’est dans ce processus que se
construisent non seulement les solidarités mais aussi le croisement des luttes
et des mouvements de contestation multiformes du capitalisme mondialisé, c’est
dans ce processus que se dessinent les pistes d’un projet alternatif de
société.

-Une lutte antifasciste
intransigeante, menée dans l’unité du mouvement ouvrier et démocratique, et
s’opposant sur le plan idéologique à toute banalisation du FN, de l’extrême
droite et de leur orientation xénophobe.

– Libérer la culture et
l’information de la marchandisation

– Une Ecole pour
l’épanouissement

2-3 L’écologie, au
coeur de notre projet de société

Une crise écologique
globale

Crise climatique, crise
alimentaire, conflits pour le contrôle des matières premières et des terres
rares, déplacements de populations : l’enjeu écologique est majeur.
L’histoire de cette prise de conscience est jalonnée par les grandes catastrophes
écologiques qui ont eu lieu, et dont Fukushima représente un nouveau moment
fort. 

La manipulation et la
marchandisation du vivant, les nanotechnologies sont, comme le nucléaire, des
enjeux et des menaces qu’exacerbe la vision technocratique, se revendiquant d’un
scientisme vulgaire, prônée par les oligarchies.

L’être humain et la
nature ne peuvent être dissociés. Il n’y a qu’un seul écosystème compatible
avec la vie humaine. Cette idée fait son chemin dans les consciences, au fur et
à mesure que s’étend la crise écologique, elle doit être au cœur de notre
projet de transformation de la société.

Cette crise n’est pas
la simple conséquence linéaire du développement industriel depuis le 19
e
siècle. Quelles en sont les causes ? Les dérives productivistes ont été
développées par une organisation de la production guidée par le seul critère du
profit capitaliste, aggravées dans le cadre de la globalisation du monde par
l’impératif du libre-échange exacerbé, et imposées par des appareils d’État et
une foule de technocrates formés à la même logique du système. La valeur
d’échange y est centrale, quand nous voudrions que ce soit la valeur d’usage
qui le soit. De leur côté, les systèmes étatiques qui prétendaient se
revendiquer du « socialisme réellement existant » ont aussi entraîné
des catastrophes écologiques.

La critique écologiste
nous rend également attentifs à des dimensions plus profondes de la crise. La
modernité, porteuse de liberté et d’émancipation, a vu certaines de ses
dimensions se retourner contre l’humain et la nature, lesquelles (se rapporte à
quoi ?) ont réduit notre appréhension du monde à sa seule dimension
mécaniste et quantifiable. Le quantitatif a trop souvent pris le dessus sur le
qualitatif, les biens sur les liens, l’utile sur le beau etc. L’économie s’est
désencastrée du social et du culturel. L’histoire du 20
e
siècle et les mouvements sociaux du Sud nous invitent à interroger les
idéologies et les modes de pensée et de vie qui ont accompagné l’expansion du
mode de production marchand que l’Europe a imposé au monde.

La généralisation
massive de l’utilisation du pétrole, le développement gigantesque de
l’automobile, le développement de l’industrie chimique et la généralisation de
sa pénétration dans tous les secteurs d’activité, et en particulier dans l’agriculture
avec les engrais et les pesticides, sont autant de traits du productivisme. La
liste des menaces écologiques est longue : basculement climatique
d’ampleur inégalé dans sa rapidité et sa brutalité, rareté de l’eau potable,
pollution de l’air, des sols, destruction des forêts, désertification, menaces
sur la biodiversité, pauvreté chronique et faim dans de vastes régions du
monde, catastrophes industrielles, épuisement progressif de l’énergie fossile,
risque nucléaire… Si rien n’est fait pour endiguer ces menaces, c’est alors
la possibilité même de construction d’une autre société, libre et fraternelle,
voire à terme de l’existence de toute société humaine à l’échelle planétaire,
qui est en cause. Les changements nécessaires sont aussi bien des conversions
des structures (des techniques de production, de l’économie, de la ville,
etc.), des modes de vie que des valeurs.

Articuler les
dimensions sociales et écologiques

Dans ce contexte, le
mouvement de lutte pour l’émancipation subit encore les contradictions entre
des convictions qui ont marqué le mouvement ouvrier, selon lesquelles le
progrès des sciences et des techniques pour peu qu’il soit encadré et régulé
permettrait de contrôler les dégâts causés par l’activité humaine à notre
environnement, et les fondamentaux d’un mouvement écologiste qui s’est
largement construit en extériorité, voire en hostilité, à un mouvement ouvrier
traditionnel, dominé par cette vision productiviste, mouvement écologiste
n’assumant pas spontanément la portée anticapitaliste de son combat. Il y a
nécessité d’analyser ces contradictions et critiquer ce qu’ont été les visions
socialistes du monde sur ces questions. Il faut par exemple intégrer la
dynamique pour une part négative du développement capitaliste, laquelle conduit
à l’inversion de forces productives en forces destructrices, par la guerre, et
par le saccage de la nature.

Contre une vision
réductrice de ces contradictions, réduites à celle qui oppose forces
productives et rapports de production, il convient d’intégrer celle entre les
forces productives sociales et la nature, et donc avec la prise en compte de
toutes les conditions de production : les travailleurs, l’espace urbain, la
nature…

Le choix d’une nouvelle
appellation ne suffit pas à régler les contradictions qui émergent de la
rencontre de l’écologie et du socialisme. Dans le souci de construire le
regroupement de nos organisations, de respecter la diversité des références qui
nous animent, sans formuler maintenant de choix terminologique, nous considérons
que cette tentative est positive. Elle rend visible notre intention de combiner
les deux dimensions dans la critique du système et dans les alternatives
avancées. Elle marque clairement le terrain politique qui nous est commun, pour
un nouveau projet de société portant haut des revendications radicales en
matière sociale, écologique et démocratique, avec l’objectif de construire un
nouveau projet émancipateur dans lequel les êtres humains décident des affaires
qui les concernent dans un nouveau rapport à la nature.

Notre écologie est
populaire, elle prend en compte le fait que ce sont les populations les plus
précaires, en France et de par le monde, qui font d’abord les frais de la crise
écologique (réfugiés climatiques, précarité énergétique, malbouffe..). Les
inégalités sociales profondes et qui s’aggravent discréditent les appels à la
nécessaire économie des ressources. Nous refusons donc les logiques
culpabilisantes qui habillent le capitalisme vert et défendons une écologie de
la justice sociale. La seule façon de répondre durablement à la crise
écologique est d’y apporter des réponses également justes socialement. Non
seulement l’ampleur de la crise écologique implique de prendre en compte la
dimension écologique dans la construction d’alternatives économiques et
sociales mais cette prise en compte permettra de répondre aux questions
brûlantes de l’emploi, des conditions de travail et de la santé.

Il nous faut construire
un projet écologique et social pour l’ensemble de la société et de la planète
et un ensemble d’objectifs articulant les dimensions sociale et écologique qui
puissent être portés par le mouvement syndical, le mouvement écologiste et la
gauche non productiviste.

La question clé est
d’œuvrer pour surmonter l’opposition souvent affirmée et instrumentalisée entre
défense de l’emploi et exigence écologique. Cela implique d’énoncer clairement
la perspective d’une transformation écologique et sociale des grands secteurs
de la production et des transports, impliquant la conversion de toute une série
d’activités, mais aussi la création d’activités nouvelles fortement créatrices
d’emplois et écologiquement soutenables. Cette perspective doit s’appuyer
clairement sur la défense des droits des salarié-es et de leurs emplois, leur
intervention active en lien avec les usagers dans les processus de conversion
ainsi que sur la revendication d’une baisse générale du temps de travail. La
transition écologique suppose de garantir aux travailleurs/euses leur
rémunération dans le cadre d’un processus de maintien des collectifs de
travail, sans que les contrats de travail ne soient rompus, donc sans
licenciement. Ce dispositif doit être financé exclusivement par les cotisations
patronales et contrôlée par les organisations syndicales. Il constitue par
ailleurs une réponse aux suppressions d’emplois massives dans les entreprises
et secteurs en réelle difficulté économique du fait de la course à la
compétitivité et aux gains de productivité.

Remettre en cause les
bases du capitalisme et du productivisme

Plus généralement, les
productions énergétiques, industrielles, agricoles, façonnées par et pour le
capitalisme, doivent être complètement réorganisées, et une large
relocalisation des activités engagée, impliquant une réduction des échanges de
marchandises et la conquête de la souveraineté alimentaire sur tous les
continents. Cela passe par une autre vision de l’aménagement du territoire tel
qu’il a été mené depuis les années 1950 et une nouvelle façon de penser la
ville. La satisfaction écologique des besoins sociaux qui doit guider
l’organisation de l’économie conduisant à un autre mode de développement en
rupture avec le productivisme n’est pas une question simple car elle doit aller
de pair avec ce que les objecteurs de croissance appellent une
« décolonisation de l’imaginaire » dominant, c’est-à-dire la lutte
contre le consumérisme, consubstantiel au capitalisme, la déconstruction de
l’aliénation par la marchandise, l’imaginaire de la résolution des problèmes
par le fétiche de l’augmentation du PIB, une conception du bien-être réduite à
l’accumulation de biens.

Nous devrons mener une
vraie bataille culturelle qui peut notamment passer par une éducation populaire
à l’environnement, à la sobriété, au partage et à la gestion de biens communs.
En ce sens, un certain nombre d’expérimentations (jardins partagés et
solidaires, éco-habitats autogérés, coopératives…) doivent être encouragées,
en ce qu’elles permettent une éducation par l’action. Nous devons aussi
(re)mettre des slogans et mots d’ordre au goût du jour, participer à des
campagnes antipublicités, refuser l’obsolescence programmée… pour illustrer
cette « décolonisation » et rompre avec le « je consomme donc je
suis ».

Les politiques
d’austérité ont aggravé la situation de la majorité de la population en effondrant
la croissance, sans que cette « croissance zéro » ne résolve aucun
des problèmes écologiques : au contraire, les capitalistes en profitent pour
obtenir des concessions sur les politiques et les réglementations
environnementales. Pour autant, il y a une dangereuse illusion à croire que le
seul retour de la croissance dans l’économie telle qu’elle fonctionne
résoudrait les problèmes : le partage de la plus-value au profit des
actionnaires, la substitution du capital au travail dans une poursuite effrénée
à la productivité, la précarisation du marché de l’emploi, la structure
inégalitaire de la richesse font que la croissance ne saurait par elle-même
répondre aux problèmes sociaux. L’indice PIB – qui ne mesure que la valeur
d’échange et non la valeur d’usage et dont l’évolution correspond à ce qu’on
appelle couramment croissance – ne dit rien en termes de développement, de
progrès social et écologique : une pollution, le succès commercial d’un bien
inutile, le gaspillage publicitaire…, font gagner des points de PIB quand
l’arrêt d’une production polluante ou le passage d’un médicament dans le statut
« générique » en font perdre. C’est pourquoi nous ne souscrivons pas
à des schémas de relance par une croissance productiviste destructrice et foncièrement
inégalitaire, sans autre finalité que les profits de quelques-uns. Quand nous
luttons contre la récession économique, le chômage et l’austérité subis par les
classes populaires, quand nous soutenons des mesures qui permettent aux
salarié.e.s de reprendre confiance et pouvoir sur leurs vies par leurs luttes
(interdiction des licenciements, embauches, augmentation de salaires..), nous
mettons en œuvre une autre logique, celle d’un développement humain, social et
écologique, pas celle de l’accumulation de capital. Nous voulons une relance
par la satisfaction des besoins sociaux, par la conversion écologique de
l’outil de production, l’épanouissement des personnes et des sociétés dans le
cadre des contraintes écologiques, dans une autre direction que celle du capitalisme
qui envoie la nature et les humains dans le mur. 

Certaines productions
doivent être supprimées, d’autres drastiquement réduites, d’autres encore très
fortement accrues ou créées de toutes pièces, afin de réduire fortement
l’empreinte écologique globale des pays du Nord et de garantir l’effectivité de
l’accès aux biens, ressources et droits fondamentaux pour toutes et tous, le
tout en réduisant fortement le temps de travail et en sortant de la logique
consumériste. Pour faire avancer cette perspective, il est essentiel
d’articuler revendications sociales et écologiques dans et hors de la sphère
productive. Les réflexions des courants de la décroissance et de l’objection de
croissance suscitent des réactions diverses, il s’agit d’un débat que nous souhaitons
avoir avec ces sensibilités spécifiques.

La transition
écologique

Que produire, où,
comment et pour qui ?

On ne peut laisser aux
capitalistes le choix de ce qui est produit et donc de ce qui est consommé,
selon leur logique de développer tout ce qui augmente les profits plutôt que ce
qui satisfait les besoins. Il est essentiel que le mouvement syndical s’empare
de ce terrain et étende leur action non seulement au partage des richesses
produites mais aussi aux choix de production : que produit-on, comment, où
et pour qui ? D’autre part, les méthodes de production capitalistes
portent atteinte à la santé des travailleurEs et des paysanNEs, trop souvent
uséEs et tuéEs à la tâche, à celle des consommateurs et peuvent présenter des
risques majeurs pour les populations, avec le nucléaire et les sites Seveso. La
défense du droit à la santé, passant entre autres par une politique de
prévention, est donc porteuse d’une exigence de transformation radicale de
l’organisation du travail et des modalités de production, au carrefour des
revendications sociales et écologiques. Il s’agit aussi de donner un sens à
l’acte de travail et de production, dans un système associant producteurs et
usagerEs, et où l’utilité sociale et écologique des biens et services fait l’objet
d’une définition et d’une reconnaissance collectives, ce qui implique des
processus démocratiques de participation et d’intervention radicalement
nouveaux

Il en est de même de la
question agricole : le passage à une agriculture paysanne agroécologique
conduirait à la création de centaines de milliers d’emplois dans le pays, tout
en offrant une alternative aux dégâts écologiques et sociaux de l’agrobusiness.
Cela suppose un bouleversement des politiques agricoles conduites en France et
en Europe ces dernières décennies, des mécanismes de garantie des revenus liés
au travail, la lutte contre l’artificialisation des sols, la priorité donnée à
la qualité des produits, ainsi que de nouveaux rapports entre lieux de
production et de consommation des denrées agricoles, notamment le développement
de circuits courts associant paysans et consommateurs. Notre objectif est de
tendre à la souveraineté alimentaire et de développer des relations de
solidarité internationale respectueuses des droits des peuples à l’autonomie et
au développement écologique et social. L’agriculture intensive capitaliste
conduit au gaspillage des ressources naturelles, appauvrit les terres et inonde
de ses produits les pays du Sud, le combat des paysanneries et des peuples de
ces pays pour l’autosuffisance alimentaire doit être aussi le nôtre. Nous nous
opposons ainsi à la ruée vers « l’or vert » : des dizaines de
millions d’hectares achetés par les multinationales dans les pays du Sud pour
produire des agrocarburants, au détriment des forêts, de la biodiversité, des
terres agricoles, et qui provoque la paupérisation de millions de paysans,
accentue la spéculation sur les denrées alimentaires et aggrave les crises
alimentaires. Nous entendons et soutenons les voix des mouvements du Sud qui
nous disent que les voies qu’ils veulent prendre pour leur nécessaire
développement ne sont pas celles mortifères empruntées au Nord. Lutter et les
soutenir contre le pillage des ressources et des matières premières est une des
dimensions de notre combat contre l’impérialisme.

Planifier la transition
énergétique

Le défi climatique ne
laisse aucun doute. Les émissions de gaz à effet de serre doivent diminuer de
50 à 85% globalement, et de 80 à 95% dans les pays développés, d’ici 2050. En
même temps, après Tchernobyl et Fukushima, nous savons que s’accroît le risque
d’accidents nucléaires aux effets non maîtrisables et d’une ampleur
incommensurable : le nucléaire ne peut être une alternative aux énergies
carbonées, d’autant que les privatisations et les principes de rentabilité, la
sous-traitance, le secret-défense qui empêche toutes discussions démocratiques,
menacent la sécurité des centrales et des salariés qui y travaillent comme des
populations.

L’engagement d’une
transition énergétique revêt un caractère d’urgence. Elle doit être
volontariste, maîtrisée, planifiée, portée par le débat démocratique, et se
fixer comme objectif de remplacer les systèmes actuels de production fondés sur
l’usage des énergies carbonées par des énergies renouvelables et alternatives non
privatisées. Elle doit également planifier une sortie rapide du nucléaire, avec
dans un premier temps la fermeture des centrales de plus de 30 ans. Cet
objectif passe par la diversification des ressources énergétiques, un
redéploiement massif de la recherche et des investissements en faveur des
énergies renouvelables, le recours transitoire à des énergies fossiles comme le
gaz, une politique dont l’objectif doit être la sobriété et l’efficacité
énergétique, donc la lutte contre les gaspillages. Le logement et les
transports sont les principaux secteurs où des économies doivent être
réalisées. Dès lors qu’ils relèvent du secteur public, c’est aussi un moyen de
répondre au mal-logement et à la précarité énergétique qui augmentent de façon
inquiétante. La transition doit ainsi s’accompagner d’une reconfiguration de la
notion de besoins, pour mettre fin à une logique de surproduction et de
surconsommation et à la croissance exponentielle de la dépense énergétique.
L’extension du champ de la gratuité, notamment pour les quantités de biens
d’usage « de base » à fournir est une réponse à la fois sociale,
écologique et démocratique. L’extension du champ de la gratuité pour les
usagers, notamment pour les quantités de biens d’usage « de base » à
fournir est une réponse à la fois sociale, écologique et démocratique.
Recherche et investissements doivent s’engager massivement vers une
diversification des sources énergétiques, c’est-à-dire la combinaison de
plusieurs sources d’énergies renouvelables gérées de manière décentralisée
permettant de répondre aux différents besoins sans dilapider les ressources. De
nombreuses possibilités existent pour un développement rapide des énergies
renouvelables, non seulement l’éolien et le solaire, mais aussi du côté des
technologies liées aux sciences de la terre (géothermie, marées, microalgues,
biomasse…), sous réserve de leur maîtrise dans l’intérêt collectif et
qu’elles répondent aux besoins sociaux d’un territoire identifié. Cette
transition implique la rupture avec la marchandisation de l’énergie et
l’expropriation des grands groupes de ce secteur.

L’extension du domaine
des biens publics et la remise en cause de la propriété des moyens de
production

Cette transition
écologique pour sa réussite suppose l’appropriation publique et sociale des
secteurs déterminants, à commencer par l’énergie et l’eau. La biodiversité et
les ressources indispensables à la vie doivent être des biens communs
inaliénables de l’humanité. Le respect des ressources en eau passe notamment
par la nécessité de priver les multinationales de la mainmise qu’elles exercent
sur cette ressource. De même, sortir l’énergie du marché concurrentiel pour en
faire un bien commun avec une tarification progressive nécessite de constituer
un service public de l’énergie, qui prendra en compte la sécurité de
l’approvisionnement, mais aussi celle de la production.

Plus généralement,
l’émancipation humaine nécessite donc que les producteurs soient maîtres de
leurs moyens de production et de leurs produits en lien avec les usagers et
consommateurs. La « crise écologique » exige de s’attaquer à tous les
secteurs clés du grand capital industriel. La réponse au défi climatique est
incompatible avec la poursuite de la logique des profits et de l’accumulation
par dépossession. Diminuer les émissions de gaz à effet de serre n’est tout
simplement pas envisageable sans briser le pouvoir des multinationales de
l’agrobusiness, de l’automobile, de la chimie, de la pétrochimie, de l’acier,
etc. sans oublier le secteur des énergies fossiles, principal responsable de la
catastrophe climatique !

Démocratie directe,
autogestion et participation des citoyens et des salariés

Les choix
environnementaux ne peuvent être réalisés sans une intervention directe et un
contrôle permanent des populations, des salariés producteurs et consommateurs,
des citoyens qui élisent leurs représentants à tous les niveaux. Nous devrons
dans nos programmes articuler les urgences immédiates et ce que nous imaginons
pour la société future. Dans nos batailles quotidiennes nous devrons proposer
non seulement des éléments qui soient crédibles et acceptables par les
populations mais qui puissent être ferments d’émancipation populaire. Les
expérimentations déjà vivantes (coopératives, Amap, éco-hameaux, zones de
gratuité, gestions publiques décentralisées etc.) nous apparaîssent comme des
« déjà-là » ou « gisements », des « pépites » du
communisme écologiste qu’il faut soutenir et développer.

La planification
écologique que nous défendons est d’abord démocratique. Elle suppose que les
populations aient la maîtrise de l’information et de la prise de décision. Le
pouvoir de décider passe dans ce domaine complexe par l’appropriation des
savoirs, une réappropriation sociale et citoyenne des orientations de la
science, une approche critique de la technique qui rompe avec le scientisme.
Par exemple, la transition énergétique ne peut être engagée sans un grand débat
démocratique remettant à plat les choix énergétiques et la sortie ou non du
nucléaire. De la même manière les politiques d’aménagement du territoire et de
« grands travaux » ne peuvent se concevoir sans possibilité de choix,
de consultation, de décision, reposant sur une démocratie active. De même, un
système énergétique basé sur les énergies renouvelables gagnerait à être très
décentralisé, non seulement pour réduire les pertes dues à la transmission mais
aussi pour être le plus adapté possible à la variété des sources et permettre
un véritable contrôle par les producteurs et les citoyens. Notre projet devrait
approfondir cette possibilité d’une mise en réseau de systèmes énergétiques
locaux, publics, gérés démocratiquement par les communautés locales.

Une démocratie
écologique ne peut s’arrêter à la porte des lieux de production : de plus en
plus de salariés résistent et sont porteurs de projets alternatifs sociaux
et environnementaux. La transition écologique ne se fera pas sans eux. Toutes
les pratiques autogestionnaires et de contrôle populaire, appuyées sur les
mobilisations sociales, les expériences collectives de productions alternatives,
en lien avec usagers, consommateurs et citoyens, sont les axes fondamentaux
pour penser une « planification écologique ». Les développements de
l’économie solidaire – qui doit se garder de la récupération marchande – font
partie de ce mouvement. Dans les villes et campagnes l’action collective contre
les grands projets inutiles et imposés – NDDL, certaines lignes TGV, etc.
– pour résister à la destruction de l’environnement est également essentielle.

Cette prise en compte
centrale de l’écologie est un élément nouveau et indispensable du programme de
tout gouvernement de gauche digne de ce nom, un gouvernement qui s’appuierait
sur la mobilisation sociale pour sortir de la crise par des mesures
anticapitalistes et écologistes. C’est ce qu’une gauche alternative, portant un
projet écosocialiste, rouge et vert, pour un alter-développement et une
écologie populaire, doit prendre en compte, dans sa vision d’un gouvernement de
rupture engageant une transition vers une transformation sociale et écologique
: rompre avec une logique étatique et technocratique modifiant à la marge les
modes de production et d’échange, s’appuyer sur un processus d’appropriation
sociale multiforme porté par la mobilisation citoyenne et des
producteurs-trices. Ainsi peut s’engager un programme, une stratégie et des
formes de luttes pour protéger les écosystèmes de façon à garantir des
conditions de vie justes, décentes et harmonieuses pour les sociétés humaines
et à favoriser largement l’émancipation politique dans la dignité et l’égalité.

2-4 Pour la démocratie

Le travail sur cette
partie est incomplet, elle abordera aussi les questions d’une politique
économique alternative, du travail, de la précarité, du temps libéré.

Une nouvelle République
démocratique et sociale

À l’opposé des
conceptions de la République qui nient la réalité de l’exploitation
capitaliste, de la domination patriarcale, de l’impérialisme et du
néocolonialisme de l’État français, il y a urgence à faire entendre avec force
l’aspiration à une véritable République démocratique et sociale. Le point de
départ d’une stratégie de transformation sociale et écologique sera la rupture
avec le régime politique existant et les institutions antidémocratiques de la V
e
République.

C’est le sens de la
revendication d’une Assemblée constituante pour permettre, sur la base d’un
processus constituant, le développement d’une véritable démocratie formant le
socle d’une VI
e République. Il s’agit
en particulier d’en finir avec le régime présidentiel et de permettre une
véritable expression de la souveraineté populaire, qui impulse les chantiers de
l’appropriation sociale et de la transition écologique, pour engager une
réorganisation d’ensemble de la société. Ce moment de l’Assemblée constituante
émerge aujourd’hui comme une étape dans tous les processus de mobilisation
prolongé que ce soit en Amérique latine ou dans les pays arabes. Il ne se
limite pas à la désignation de représentants qui rédigent une nouvelle
constitution, mais à des allers-retours avec des assemblées populaires, des
états généraux, des forums citoyens avec les organisations sociales et
politiques, et des référendums populaires validant les choix des constituants.
C’est un processus durable, mettant au coeur l’engagement citoyen et le débat
public, qui entraîne une réévaluation par la société dans son ensemble de
l’ensemble de ses règles communes et des fondements qui doivent prévaloir.

Le moteur de cette
révolution, c’est de donner toute leur place à tous ceux qui aujourd’hui se
retrouvent exclus des institutions, qui n’ont plus accès aux droits, qui ne
peuvent pas participer à la représentation de tous. Il faut donner voix aux
sans-voix, aux plus précaires, souvent les jeunes et les chômeurs, donner une
place pleine et entière aux femmes qui continuent d’être marginalisées, mettre
à bas les barrières institutionnelles, sociales et politiques empêchent la
participation des populations d’origine étrangère résidentes, privées de
citoyenneté et du droit de vote.

Cela implique enfin un
développement nouveau de la démocratie dans les territoires, à l’opposé d’une
logique de mise en concurrence qui accentue les inégalités entre eux et les
entraîne dans une course mortifère pour attire les capitaux. Les échelons
locaux, que ce soit les communes, les départements et les régions, garantissant
le droit effectif des citoyenNEs à participer à la prise des décisions les
concernant par l’élection de leurs représentantEs, et le recours à la
consultation directe décisoire chaque fois que nécessaire, dotés de réels
moyens financiers, peuvent être des outils décisifs de l’implication de la
majorité de la population et un moteur puissant du développement économique et
écologique. Un tel processus pour une nouvelle constitution respectera le
principe de l’autodétermination des peuples, de leurs droits et de leurs
cultures, en particulier des langues et cultures régionales de l’Hexagone, au
sein d’une nouvelle République, et du droit des peuples des territoires et
département d’outremer à redéfinir librement la nature de leurs liens avec celle-ci.

La transformation de la
société ne se limite pas à un changement de majorité parlementaire. Pour rompre
avec l’économie de marché, les mouvements sociaux rassemblent des énergies, des
potentialités qui portent les moyens d’une sortie du système capitaliste.
Combiner la libération sociale et le respect des contraintes écologiques ne
sera possible qu’en réorganisant les structures politiques, économiques et
sociales de fond en comble.

Cela rend nécessaire de
débattre pour définir la démocratie possible.

° L’impératif de la
démocratie dans les questions les plus quotidiennes.

Il impose la défense de
toutes les libertés démocratiques, il suppose une pratique respectueuse des
formes d’organisation que se donne le mouvement populaire, il est au cœur de
notre projet, qui promeut la défense et l’extension du suffrage universel. La
participation citoyenne sera rendue possible par la garantie effective des
droits civils, politiques, sociaux et environnementaux, accompagnée d’une
réduction radicale du temps de travail

Pour qu’existe la
démocratie la plus large possible, cela appelle le développement des pratiques
d’auto-organisation et d’autogestion. Cet impératif impose de dépasser la
césure entre mouvement social et politique institutionnelle : quelles
réorganisations des services publics, et de toutes les institutions ?
Comment cela se prépare dans une pratique de nos élus en lien avec les
mouvements sociaux ? Comment, avec toutes sortes d’expériences pratiques
actuelles permettre le développement de toutes les formes possibles de
démocratie participative et de contrôle ?

Nous visons une
dynamique des mobilisations populaires de masse qui contrecarre les logiques
d’intégration et d’institutionnalisation du système. Et cette démocratie
suppose un système médiatique qui développe l’esprit critique des citoyens.

° Affirmer la
perspective de la rupture
.

Un mouvement social
contre les puissances dominantes du système capitaliste est indispensable pour
la rupture telle que nous proposons de la discuter et de la préparer.

Il doit articuler
mobilisations et élections, dynamiques populaires et victoires
électorales, rapports de force conquis par les luttes, les grèves, l’auto
organisation, et le contrôle démocratique via le suffrage universel. Nous
visons l’avènement de gouvernements rompant avec la logique capitaliste et
engageant une transformation profonde des rapports sociaux.

Une révolution
citoyenne, sociale et démocratique passe par l’instauration de nouvelles
institutions par le biais d’une Assemblée constituante et de la fondation d’une
VI
e République
démocratique et sociale; une nouvelle Constitution, la construction d’un droit
nouveau, qui garantira la séparation des pouvoirs publics, par ailleurs
radicalement remodelés.

Elle ne peut rester
enfermée dans le système des règles délégataires qui étouffent les possibilités
d’initiative, de culture d’invention portées par les exploitéEs et les
oppriméEs. Citons ce qui fait d’ores et déjà partie des discussions :
autogestion généralisée des unités de travail et des institutions politiques
locales, mise en place d’assemblées régionales et nationales garantissant le
droit effectif des citoyenNEs à participer à la prise des décisions les
concernant par l’élection de leurs représentantEs, et recours à la consultation
directe décisoire chaque fois que nécessaire.

Nous devons ouvrir la
discussion : au-delà des expériences populaires déjà réalisées depuis plus
d’un siècle, nous voulons mettre à l’ordre du jour une République autogérée et
l’autogestion dans l’ensemble des activités de production.

Cette option est une
des conditions décisives pour une rupture avec les logiques productivistes qui
ont abouti à la crise de l’écosystème humain et risquent d’entraîner une
régression majeure pour l’humanité.

° Une démocratie qui
remette en cause la propriété privée des moyens de production
.

Une véritable
alternative de sortie du capitalisme suppose de réaffirmer le projet d’en finir
avec la propriété privée des principaux moyens de production et d’échange,
d’abolir la propriété lucrative. Sans une rupture avec les institutions et les
logiques marchandes, il serait illusoire de parler de « socialiser ».
Sans une extension maximale d’une démocratie à tous les niveaux, un nouveau
mode de gestion de la société et de pouvoir, il ne serait pas possible de
décider quoi et comment produire, de défendre les biens publics ni de
développer une transition écologique. Cela suppose de déposséder la minorité
des moyens de production et d’échanges qu’elle détient. Cette appropriation
publique et sociale par l’ensemble de la population nécessite de planifier la
production et les étapes de la reconfiguration de celle-ci, le marché n’étant
plus utilisé que comme un instrument second et subordonné.

 Elle suppose une
réduction radicale des inégalités de revenus et des patrimoines.

Toutefois, en rester à
la seule question de la propriété, absolument incontournable, sans promouvoir
des processus démocratiques de décision, conduirait à reproduire des impasses
étatiques et les logiques de domination et de « caporalisation», en
contradiction avec la visée d’une révolution démocratique.

° Émancipation,
écologie, égalité : horizon et chemin

On ne détruit bien que
ce que l’on remplace ! Sinon, les retours des ressentiments, on le sait,
sont terribles. Pour changer le pouvoir, l’enjeu est de faire pouvoir la grande
masse de celles et ceux qui en portent la possibilité. Partant du combat pour
l’extension des droits des salariéEs, se pose la question de la propriété. Le
changement de la propriété est une condition nécessaire mais non suffisante
d’une véritable appropriation sociale.

Féminisme, écologie,
rejet des discriminations, aucun de ces domaines de lutte n’est secondaire pour
consolider le bloc politique que nous devons faire vivre. Nous visons à la
remise en cause et l’extinction de toutes les oppressions et discriminations,
de genre, d’orientation et d’identité sexuelle, de « races » et de générations.

Un « étatisme dirigiste
» ne peut pas réussir à vaincre le système capitaliste et le remplacer par des
avancées de l’émancipation.

Cette volonté de lutte
contre les hiérarchies et les élitismes est inséparable du projet de changer le
système.

Ce processus s’appuie
et se développe en lien avec le rythme des mobilisations et de la participation
populaire, les orientations tranchées par le suffrage universel, le
développement de la conscience commune des choix et des priorités à se fixer, à
travers une démultiplication des débats populaires.

° Des exigences
présentes et leur horizon

Devant ce qui se passe
sur le terrain financier, les dettes des États, une exigence se fait jour de
plus en plus largement : pourquoi ne fait-on rien contre ces profiteurs ?

C’est d’ailleurs ce qui
s’exprime dans bien des luttes, dans certaines entreprises mais aussi sur la
question des biens communs, sur le service public avec la dynamique engagée par
les états généraux. Changer le travail pose la question de qui décide et en
fonction de quels critères : c’est bel et bien la question de la propriété et
du pouvoir dans les entreprises qui se trouvent posée.

Déjà aujourd’hui, de
grands enjeux économiques sont perçus comme devant relever du « bien commun »
par une majorité de la population et ne devant pas être soumis à la logique du
marché. C’est le cas en ce qui concerne la gestion de l’eau, l’énergie, les
transports, la santé, l’école. Ces domaines ne peuvent être soumis à la loi du
marché et au règne de la concurrence.

Nous considérons
légitimes toutes les exigences qui renforcent et développent le pouvoir de
décision et de contrôle des salariéEs et de leurs représentantEs dans les
entreprises renforcement des prérogatives des représentantEs du personnel,
droit de veto des salariéEs et/ou de leur représentantEs sur les licenciements
et les « plans sociaux », ouverture des livres de compte et accès à
l’ensemble des informations nécessaires… Ces exigences sont inséparables de
l’affirmation du droit des citoyenNEs et des éluEs à prendre part aux processus
de décisions sur la production et ses finalités.

Notre projet est la
construction d’une société où les échanges comme la production des biens et des
services sont essentiellement assurés par des services publics (territoriaux,
nationaux, européens et internationaux), des entreprises publiques, des
coopératives autogérées et toute autre forme d’appropriation sociale de la
production.  

La distribution des
différents types de structures, la place et le rôle des salariéEs et de leurs
représentantEs d’une part, des citoyenNEs, du suffrage universel et des éluEs
d’autre part, des usagerEs/consommateurEs et de leur représentantEs enfin, doit
faire l’objet d’une discussion différenciée en fonction des productions et des
niveaux considérés. Cela ne peut se séparer des discussions pour une
Constituante et une nouvelle République.

 La défense des
services publics, les mobilisations pour leur développement et pour la création
de nouveaux, la défense des monopoles publics et la lutte contre les mises en
concurrence et les privatisations s’inscrivent ainsi dans un double objectif :
la défense des services publics comme instruments d’égalité, et la promotion
d’entreprises et de services qui, avec bien des imperfections structurelles,
représentent des modèles de production alternatifs au modèle de l’entreprise
capitaliste et de l’artisanat.

Des batailles
politiques se mènent également, souvent portées par le mouvement syndical et
associatif, pour faire reconnaître des besoins nouveaux qui émergent et qui
doivent relever d’une extension des services publics, par exemple à travers la
question de la prise en charge de la petite enfance, de la perte d’autonomie,
du logement.

Mais l’enjeu est
également de transformer en profondeur la conception des services publics, pour
que l’usager ne soit pas seulement entendu, mais soit partie prenante des
décisions, du fonctionnement et de leur évolution.

L’extension de la
démocratie et de la citoyenneté suppose de faire éclater la barrière entre «
citoyen » et « salarié ». Il faut faire entrer la citoyenneté dans le monde de
l’entreprise, donner de nouveaux droits aux salariés, mettre un terme à la
dictature des actionnaires qui n’a pour but que la recherche du profit. L’enjeu
profond de la rupture avec le capitalisme est d’en finir avec ce
« despotisme d’usine » dont parlait Marx qui détourne les énergies et
l’intelligence productive de millions de salariés, d’ingénieurs, de techniciens
de la progression du bien commun.

Le point de départ sera
de faire entrer la démocratie dans l’entreprise qui amorcera le contrôle des
salariés sur les principales décisions stratégiques. Le développement d’une véritable
démocratie sociale et politique au sein du monde l’entreprise est la clé de la
rupture avec l’ordre capitaliste et la domination de la bourgeoisie

Faire prévaloir la
coopération et la recherche du bien commun sur la concurrence et la course au
profit nécessite ainsi d’envisager l’extension de la démocratie comme le cœur
de la démarche transitoire à développer. La planification comme certains
mécanismes de marché ne sont pas des fins en soi mais uniquement des moyens,
qui doivent être l’objet de délibération collective et au service de l’objectif
du développement d’une société qui permette la satisfaction de besoins de
chacun, l’épanouissement collectif et individuel et la maîtrise par l’humanité
de sa vie commune.

2-5 Le monde que nous
voulons

– Contre la
globalisation, une nouvelle architecture internationale

– Être utiles contre
les conflits et guerres à travers le monde

 Conclusion de
cette partie « élaboration programmatique » : 

Notre regroupement
représente la confluence de forces issues de traditions et de références
plurielles, se réclamant du marxisme révolutionnaire, de l’écosocialisme, du
communisme, républicaine et socialiste, de l’anticapitalisme, de l’objection de
croissance, du socialisme rouge et vert, de l’écologie populaire, de la tradition
communiste révolutionnaire, de l’anticapitalisme, pour les autres des apports
de l’autogestion et de l’écologie anticapitaliste ou encore de
l’alter-développement. Pour d’autres encore de la crise du Parti communiste ou
de celle du Parti socialiste, dont la direction est totalement incapable
aujourd’hui de redonner du sens au projet initial de République sociale, et
également du mouvement social, du syndicalisme, du mouvement associatif, du
mouvement altermondialiste, tous en capacité de produire une réflexion
politique d’ensemble.

Grâce à cette
diversité, elles constatent une profonde convergence de vues comme ce texte en
témoigne, suffisante pour se regrouper et agir dans un cadre commun. Elles
entendent travailler à faire émerger, avec d’autres, une nouvelle synthèse
dessinant les perspectives d’une nouvelle société et les grands traits d’une
stratégie pour y parvenir.

Le nouveau regroupement
se situe donc dans la confluence de ces différentes traditions et références
dont il hérite et avec lesquelles il a vocation à travailler et à débattre.

 

Partie
3 : Avec et dans le Front de gauche, dans les mouvements sociaux,
construire une force politique nouvelle pour l’émancipation

 

3.1) L’alternative est
à refonder.

Il ne s’agit pas de
simplement de restaurer les problématiques anciennes portées par les partis
communistes et socialistes qui ont majoritairement structuré le mouvement
ouvrier au cours des deux siècles passés, et qui ont été mises à mal par
l’histoire du 20
e siècle. Nous savons
qu’il faut en dépasser les bilans pour renouer le fil de la lutte historique
pour l’émancipation.

Il s’agit de faire
exister une alternative au capitalisme : de la nécessité et la possibilité
d’une transformation de tous les rapports sociaux, d’une humanité émancipée. Il
faut donc affirmer une dynamique commune intégrant les grandes et nouvelles
exigences pour lesquelles luttent les divers mouvements qui se sont affirmés à
la fin du 20
e siècle : le féminisme
avec le mouvement de libération des femmes, la solidarité planétaire des luttes
d’émancipation avec le mouvement altermondialiste, l’aspiration
autogestionnaire réaffirmée dans les combats de classe, la conscience
écologique avec les forces de l’écologie politique…

Il s’agit aussi et
surtout d’assumer la nécessaire rupture avec ce qui a dominé l’histoire des
forces de gauche, sous des formes multiples : une ignorance, voire une
hostilité à l’impératif de la démocratie et une vision hiérarchique des
rapports entre organisations politiques et mouvement sociaux. Nous savons que
cet impératif démocratique doit être au cœur de notre conception de la
politique dans toutes ses dimensions.

Nous le savons d’autant
plus que l’un des aspects de la crise globale et systémique à l’échelle
mondiale est la crise de la démocratie représentative, de la politique et de sa
représentation.

Cet aspect de la crise
prend notamment en France et en Europe la forme d’un rejet grandissant des
formes politiques classiques et des partis existants, de plus en plus perçus
comme de simples machines électorales, extérieures à la société et en
particulier au monde du travail (salariéEs, précaires, chômeurs et chômeuses)
et à la jeunesse.

Les partis
traditionnels du mouvement ouvrier, basés sur un fonctionnement pyramidal et
hiérarchique, dominés par les élus, et prétendant soit dominer le mouvement
social soit séparer les tâches (au mouvement social les luttes, au parti
d’incarner le débouché politique), n’échappent pas à cette crise.

Voilà pourquoi toute
nouvelle force politique qui reproduirait l’existant dans sa conception et son
fonctionnement serait vouée à l’échec.

Voilà pourquoi nous
devons « donner à voir » et ainsi convaincre que d’autres pratiques
politiques sont possibles.

Nous considérons le
Front de gauche comme l’outil et l’espace politiques indispensables pour
relever ces défis, inventer les réponses nécessaires, construire la force
organisée apte à les porter.

Nous considérons que le
Front de gauche doit se donner pour ambition de faire naître une nouvelle force
politique répondant aux défis du temps, représentant une réponse possible à la
crise que connaît le mouvement ouvrier. Cela implique une transformation
profonde qui demandera du temps, des expériences pratiques et une élaboration
théorique en fonction des développements des luttes sociales, et pour les
partis politiques des dépassements assumés de leur histoire et de ce qu’ils
sont aujourd’hui.

Pour notre part, nous
ne prétendons pas disposer du modèle de ce que devrait être cette force
politique nouvelle : un « parti » ? Un « mouvement » ?
Sans doute, mais en créant des relations avec le peuple, les travailleurs et
les mouvements sociaux qui sont totalement à définir ; donc d’un type tout
à fait nouveau. En revanche, nous sommes disponibles d’ores et déjà pour mener cette
réflexion avec toutes celles et tous ceux qui sont intéressés, au premier chef
les organisations membres du Front de gauche, mais aussi touTEs les militantEs
associatives, syndicalistes, de divers réseaux citoyens qui n’ont pas
d’appartenance politique actuellement. Nous sommes déterminés à avancer sur
cette voie des recompositions politiques que rendent possibles l’existence et
la dynamique du Front de gauche tel que nous le souhaitons.

Nous avons réalisé un
rapprochement de six organisations (Fase, GU, Alternatifs, GA, CA, R&S) qui
nous permet d’exister ensemble comme un courant d’idées au sein du Front de
gauche. À présent, nous nous engageons dans une nouvelle étape, qui est de
travailler à réunir les conditions d’un rapprochement organisationnel. Dès la
réunion nationale de mi-juin 2013, s’ouvrira un processus de travail et
d’élaboration commune entre courants organisés, comités locaux et toutes celles
et tous ceux qui voudront s’inscrire dans cette construction collective.

Dans un premier temps,
notre rapprochement organisationnel ne peut être conçu que comme la combinaison
de comités locaux et de courants organisés non contraints de se dissoudre. De
juin à octobre 2013 une équipe transitoire d’animation sera constituée au
consensus avec comme mandat :

– de faciliter le débat
sur un texte d’orientation politique qui sera adopté en octobre, date où se
tiendra une réunion nationale large des collectifs locaux,

– de proposer à la
discussion la mise en place des structures et outils qui permettront le travail
collectif dans la période de transition qui s’ouvrira à partir d’octobre 2013
(une première liste des principes qui devraient préciser les règles de travail
collectif est à la fin de ce document).

Nous considérons qu’une
concrétisation d’une avancée sur cette voie serait la démonstration de la
possibilité de surmonter des divisions politiques héritées du passé, de
contribuer à faire converger des traditions et cultures différentes. Et ainsi
d’être utiles à tout le Front de gauche et dans les mobilisations sociales, écologiques,
féministes, démocratiques…, par le renforcement des capacités politiques
qu’elle permettrait pour celui-ci, et en éclairant les voies et moyens de
dépasser positivement la situation présente.

Tous nous étions
rassemblés dans le mouvement des collectifs du Non en 2005. Aucune de nos
organisations ou de nos courants ne peut à elle/lui seul refonder une dynamique
politique d’ensemble, après les crises multiples des organisations qui se sont
côtoyées ou combattues au 20
e
siècle, et sont confrontées maintenant à des défis nouveaux de programme,
d’élaboration, et face à des expériences inédites. Les anciennes frontières et
concurrence entre courants, souvent explicables et justifiées dans leur
contexte politique, ne sont plus fonctionnelles pour agir efficacement
aujourd’hui, alors que le défi est de rassembler toutes les résistances et
toutes les cultures militantes contre les ravages et les régressions de
civilisation dues aux crises que connaît le capitalisme contemporain,
capitalisme mondialisé et financiarisé inapte à répondre aux risques
écologiques, et générant des dangers mortels pour la planète entière et
l’humanité. La question est de contribuer à refonder ensemble un nouveau
projet, en y apportant le meilleur de nos traditions respectives, et en ayant
la conviction que c’est dans l’évolution du Front de gauche dans son entier
qu’un tel projet peut prendre sa véritable portée politique.

En même temps, porteurs
des histoires qui sont les nôtres et de nos convictions, nous ne cherchons pas
à délimiter dans le Front de gauche un espace plus radical, plus
révolutionnaire ou plus anticapitaliste, au nom d’une logique de concurrence
avec les autres composantes. Il ne s’agit pas non plus de taire les divergences
et de ne pas en débattre, mais de le faire, quand il y en a, avec la volonté de
dépassement positif des problèmes, en conservant la démarche du consensus,
laissant en débat ce qui ne fait pas accord. Lorsque le Front de gauche n’est
pas partie prenante d’initiatives ou d’actions unitaires, nous pouvons décider
d’y participer comme c’est le cas par exemple à Notre-Dame-des-Landes ou pour
les luttes antinucléaires.

3.2.) L’impératif
démocratique

* L’impératif
démocratique doit être au cœur de notre rapprochement comme de la force
politique nouvelle à construire à partir de l’outil et de l’espace qu’est le
Front de gauche.

* Cet impératif
démocratique, c’est la volonté de contrecarrer les logiques de confiscation, de
bureaucratisation et d’institutionnalisation, avec la garantie du pluralisme
des débats, le refus permanent de pratiques autoritaires, manipulatrices et
machistes, le refus des rapports de subordination, d’instrumentalisation
vis-à-vis du mouvement syndical et social. Cela implique également une rupture
avec le modèle du « parti guide » ou « d’avant-garde », ou
les conceptions élitistes, et avec le modèle d’une organisation autour d’un
seul courant hégémonique. Il s’agit donc vraiment de construire une
organisation en commun, ce qui nécessite un effort subjectif, une volonté partagée,
un saut qualitatif.

* Nous voulons un
fonctionnement favorisant le débat, l’élaboration et la confiance commune, la
transparence, le respect des positions des uns et des autres pour la
construction de la conviction mutuelle, l’action commune de ses militantEs en
fonction d’une orientation nationale. La recherche du consensus est conçue
comme processus d’invention collective de solutions qui dépassent les
oppositions ou différences initiales.

* Nous favorisons des
pratiques concrètes comme le non-cumul des mandats – internes et externes – y
compris dans le temps, la parité à tous les niveaux, la recherche de la
diversité des origines culturelles et sociales dans toutes les instances, des
méthodes d’animation et d’organisation favorisant la participation de chacune
et chacun quels que soient les engagements professionnels ou familiaux, le
droit des militants à l’objection individuelle ou collective.

Dans le cadre de notre
rapprochement comme pour la force politique à construire à partir de l’outil et
de l’espace du Front de gauche, il s’agit aussi d’inventer une nouvelle
relation non hiérarchisée entre « parti » et « mouvement social ». Une
force politique perméable aux aspirations exprimées par les mouvements sociaux,
capable de nouer des échanges et des partenariats sur un pied d’égalité avec
ceux-ci, une force agissant en permanence pour les alliances politiques et
sociales les plus larges pour transformer la société, et présente sur tous les
terrains de l’alternative.

Rôle des éluEs : ni
autonomie des élus par rapport au parti ni subordination des élus au parti ;
des élus porte-voix et appuis des luttes. Des élus contribuant à élaborer des
traductions politiques et législatives des besoins sociaux, écologiques,
démocratiques et d’exigences issues des luttes d’émancipation.

* Une fois stabilisée
l’organisation commune, avec une évolution des courants d’origine et une
confiance démocratique mutuelle, nous visons une organisation qui
fonctionnerait selon le principe : une personne, une voix.

Dans ce cadre, seraient
élues des instances représentatives des groupes locaux et régionaux et des
différentes positions politiques en présence.

3.3.) Se constituer en
mouvement dans le Front de gauche

Pour préciser les
règles de travail collectif pour un mouvement en transition, durant sans doute
tout au moins la première année, nous pourrions partir des principes suivants :

– se placer dans la
perspective d’une structuration mixte avec d’une part, suivant les rythmes de
développement possible, des adhésions individuelles à des collectifs locaux
dotés d’une large autonomie et d’autre part, des courants et composantes
organisés à l’échelle nationale

– la recherche du
consensus ou de majorités très larges pour éviter un fonctionnement qui
pourrait déposséder individus et comités au profit des courants organisés, et
réciproquement éviter un fonctionnement qui pourrait faire fi de l’avis des
courants toujours existants. Le consensus ne signifie pas le refus de toute
procédure de vote : il peut y avoir des votes indicatifs suivis de nouvelles
délibérations pour déterminer comment une décision est prise ou reportée.

– l’identification de
questions politiques qui peuvent être laissées en débat ;

– l’articulation entre
collectif militant démocratique et autonomie des individus et des comités;

– un respect des
rythmes ou des niveaux d’engagement militants différents, où chacunE trouve sa
place, un effort constant pour l’information et la formation, de bienveillance
et de transparence dans les échanges ;

– des moyens discutés
pour assurer l’égalité femme-homme

– des temps de débats
sur l’orientation et les axes principaux d’intervention donnant lieu, après
discussion dans les groupes locaux, à des réunions nationales pour synthétiser
les échanges et définir des perspectives.

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