Jean-Claude Michéa : « Arriver à reconstruire un front commun entre les gens ordinaires » (Montpellier journal)
D’après les sondages, 37% [des gens] ne
se reconnaissent plus ni dans la gauche ni dans la droite et 67% (ça
inclue ceux qui ne se reconnaissent pas et ceux qui se reconnaissent)
disent : « Mais de toute façon, ça ne changera rien. » Ça veut
donc dire qu’il se passe quelque chose dans la société. Si la gauche
aborde ces travailleurs, ces employés, ces petits entrepreneurs en leur
disant « devenez de gauche », c’est leur poser une contrainte symbolique qui fait qu’on va les éloigner.Il faut trouver un langage
anticapitaliste – en terme de peuple contre la nouvelle aristocratie –
qu’ils peuvent entendre. Le problème a été posé dans la Première
internationale quand un certain nombre de mouvements – parfois des
bakouniniens – disaient : «
Quand on est socialiste, on doit être athée. Travailleur si tu veux
rejoindre l’Internationale du Parti socialiste, abandonne ta religion. » Et là, Marx et la majorité de l’Internationale disaient : « Mais attendez, c’est probable que l’athéisme est plus compatible avec le socialisme [qu’avec la religion]
mais on ne peut pas les diviser sur ce problème secondaire. On va dire
aux travailleurs : tu viens te battre sur un programme anticapitaliste
et on ne te demande pas de renoncer à ta religion, à tes symboles
affectifs, à ce qui donne un sens à ta vie, tant que tu es d’accord sur
l’essentiel. » […]Jean-Claude Michéa, la crise du capitalisme et la difficulté de la gauche à « percer »…