Retraites Questions aux Verts-Europe Ecologie

Comment peut-on être pour la retraite par répartition à Montpellier et contre à Strasbourg (au Parlement européen) ?


On avait bien entendu Cohn-Bendit [DCB] cet été se moquer de ce qu’il qualifiait de crispation idiote sur les “60 ans”. Il a d’ailleurs récidivé tout récemment, dans un débat tout en amabilités, souvent flagorneuses, avec la sarkozyenne secrétaire d’Etat Rama Yade qui ne serait pas “de droite” (sur la question des jeunes) et qu’il choisirait…contre Copé (!) : “On ne me fera jamais avaler qu’en réclamant la retraite à 60 ans, on est de gauche, et qu’en la portant à 62 ans, on est ultraréac. […] Pour moi, l’âge de la retraite doit aller de 55 ans à 65 ans selon le boulot, le type de travail, la pénibilité.” (Les Inrocks).

Alors on se dit que DCB ce n’est pas tout à fait les Verts ni Europe Ecologie à lui tout seul malgré l’ego de soixante-huitard renié qui le “travaille” sur le mode “trublion inoffensif de l’ordre institutionnel dominant”. Cet ego surdimensionné et médiatiquement cultivé qui l’autorise (à grands coups de “c’est stupide”, “c’est imbécile”, ces substituts dérisoires des pavés lancés pour de vrai et dans l’autre direction il y a plus de 40 ans) à jouer au donneur de leçons supérieur (pardon pour la redondance) sur tout et sur rien, surtout envers tout ce qui bouge trop à gauche. Parce que, il faut comprendre, cela donne de l’autorité politique d’avoir fait du chemin, beaucoup de chemin, avec bien des virages à droite, depuis qu’ on a dit adieu à celle qu’on affirme avoir tant aimée (1). Mais passons.

En rupture avec ce “droitisme” cohn-benditien, nous avons en effet sous les yeux ces camarades des Verts-EE qui défilent avec nous à Montpellier (probablement ailleurs) pour défendre les “60 ans comme l’attestent les photos ci-dessus et ci-dessous prises lors de la dernière manifestation. Et puis encore nous avons ce communiqué unitaire de défense des retraites, signé il y a quelques jours, toujours à Montpellier, où les Verts se prononcent sans équivoque, avec le NPA, le PG et la Fase (2), pour le retrait du projet de loi Woerth-Sarkozy et lancent l’invitation à se mobiliser, y compris par la grève générale reconductible : “Contribuons là où nous vivons, là où nous travaillons, à renforcer la mobilisation majoritaire qui est en cours. La grève générale, interprofessionnelle et reconductible peut faire céder le gouvernement. Construisons-la dans l’unité avec nos syndicats, à la base comme au sommet.(3) De quoi donner des convulsions au complaisant interlocuteur de Rama Yade !

Alors la question est celle-ci : comment ces militants écologistes montpelliérains, ces militants héraultais des Verts, apprécient-ils que leurs élus au Parlement européen, et pas seulement l’égolâtre Dany, viennent de voter un rapport, soutenu, eh oui, par les socialistes français et leurs camarades européens (le rapporteur est même une élue française du PSE), qui appelle à la mise en place de « marchés du travail (…) qui offrent plus de souplesse aux employeurs » et qui réclame des « mécanismes d’incitation et de sanction » pour les États ne respectant pas le pacte de stabilité (qui limite le recours à la dette publique) ?” Pis, écrit L’Humanité d’où nous tirons cette info, sur les retraites, le texte considère que « le financement des pensions ne peut être entièrement laissé au secteur public, mais doit reposer sur des systèmes à trois piliers, comprenant des régimes de retraite publics, professionnels et privés ». (4)

C’est à juste titre qu’un député communiste en conclut que « Ce n’est ni plus ni moins que la fin de la retraite par répartition et le soutien à la politique de Sarkozy que nous proposent les socialistes et les Verts en votant ce rapport !” Nous ne nous arrêterons pas ici à interroger cet élu communiste sur la stratégie d’alliance maintenue, en France, par son parti avec des saboteurs de “gauche”, à Strasbourg-capitale européenne, de cet acquis central du salariat qu’est la retraite par répartition. Restons avec nos amis écologistes et interrogeons-les :

“Vous dites vouloir faire de la politique autrement. Alors comment sortez-vous de ce qui, sur les retraites, s’apparente, malgré vous, nous l’espérons, au vieux, très vieux double langage, à deux accents, ici, montpelliérain et alsacien ? Que peuvent bien penser tous ces salariés, tous ces jeunes qui défilent avec vous, avec nous, de cette géométrie politique variable où c’est, de fait, Cohn-Bendit, pas Roumégas, qui est le centre de gravité? Nous supposons par là, bien sûr, que celui-ci, avec sa double casquette d’élu municipal à Montpellier et de porte-parole national de son parti, est au diapason de ses camarades locaux”.

Antoine (comité NPA du Pic-Saint-Loup)

(1) DCB a publié en 1986 Nous l’avons tant aimée, la Révolution (Barrault Éditions). Pour une analyse critique décapante de ce parcours politique, voir l’ouvrage de Paul Ariès et Florence Leray, Daniel Cohn-Bendit, l’imposture (éditions Max Milo).

On ne dira jamais assez qu’il ne s’agit pas pour nous, au NPA, de cultiver la nostalgie d’un moment aussi important dans l’histoire que Mai 68. On peut même s’atteler à en souligner les limites et les échecs. Mais notre différence avec un Cohn-Bendit, c’est que nous en retenons la matrice anticapitaliste et que nous l’intégrons, comme d’ailleurs l’expérience de la Commune ou la révolution de 17 (quelle horreur!), à notre réflexion en cours dans la définition d’un changement radical de société propre à l’instant où nous vivons et en prise avec un système toujours structurellement inégalitaire mais qui n’est plus celui du 19e siècle ni même plus tout à fait celui du 20e.

DCB, lui, s’accommode définitivement du capitalisme et prétend, en cela il est resté un indécrottable utopiste, qu’il est possible de l'”améliorer” ! On comprend mieux ainsi ses sorties furibardes contre tout ce qui lui rappelle la radicalité perdue dans la triste histoire de son embourgeoisement politique qui l’a amené à battre l’estrade pour le oui à la constitution européenne avec un ministre du très UMP Raffarin (Barnier) ou à envisager, un temps, de s’allier avec Bayrou. Et maintenant c’est l’unité gouvernementale avec le PS qu’il vise en mettant sur orbite la fraîche émoulue écologiste Eva Joly ! Autant d’indices patents, par delà ses moulinets rhétoriques et ses acrobaties dialectiques, des limites politiques de celui que, contre toute évidence et probablement pour mieux exorciser le spectre de celle qu’il aimait tant, on persiste à nous présenter comme l’emblème de 68!

(2) Le Parti Communiste contacté n’a pas répondu à nos sollicitations.

(3) Retraites Communiqué départemental du NPA, du PG, de la Fase et des Verts

(4) Le Parlement européen préconise la fin de la retraite par répartition (L’Humanité)

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Liste des députés Verts-EE ayant voté ce rapport :

Alfonsi, Besset, Bélier, Benarab-Attou, Canfin, Cohn-Bendit, Delli, Flautre, Jadot, Joly, Kiil-Nielsen, Rivasi.

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Ensemble 34