Profs pas sages ! Les sanctions levées contre Bastien Cazals ont été rétablies !

Bastien Cazals, directeur de l’école maternelle Louise Michel à St Jean de Védas (Hérault), avait écrit au président de la république qu’il n’appliquerait pas les réformes Darcos à l’école. Convoqué par l’Inspecteur d’Académie, puis sanctionné par des prélèvements sur son salaire, son ititiative est devenue symbolique et a reçu de très nombreux soutien
Dans le cadre d’une journée nationale, un rassemblement a eu lieu devant l’Inspection d’Académie, des lettres de désobéissance ont été remises par 384 enseignants de l’Hérault (les syndicats en espéraient une centaine). Deux cents personnes avaient également manifesté à Saint Jean de Védas en soutien à Bastien Cazals mardi soir. Vendredi matin, l’insepction académique décide de lever toutes les sanctions mais celles-ci ont été rétablies samedi.

Rétablissement des sanctions…
sur le site : http://uneecolepourvictorethugo.hautetfort.com/

Ayant pris connaissance, par voie de presse, du communiqué de monsieur le Recteur de l’Académie de Montpellier et des propos de monsieur l’Inspecteur d’Académie de l’Hérault, Bastien Cazals réaffirme son engagement d’accueillir des élèves sur le temps dévolu à l’aide personnalisé à partir de janvier 2009, et précise que cela sera fait dans le cadre du dispositif déjà validé par l’Inspectrice de l’Education Nationale de la circonscription de Gignac, conformément à ses obligations de service.

En rejoignant ainsi la position commune aux « désobéisseurs » Bastien Cazals souhaite concilier ses obligations de service et la nécessaire poursuite d’une opposition active aux transformations actuelles de l’école publique.

communiqué du SNUipp 34 du 19/12/08

1. Toutes les sanctions sont levées contre notre collègue Bastien Cazals, la procédure disciplinaire est abandonnée

Ce vendredi 19 décembre, nous apprenons que l’Inspection Académique de l’Hérault, a décidé de lever toutes les sanctions contre notre collègue Bastien Cazals, directeur  » désobéissant  » de l’école maternelle Louise Michel de Saint Jean de Vedas.

Cette décision d’apaisement est à porter au compte de l’immense élan de solidarité qui s’est manifesté autour de Bastien, d’un élargissement de la vague de  » désobéissance  » des enseignants des écoles qui touche désormais au delà des 385 professeurs d’école de l’Hérault, de nombreux départements, et de l’engagement massif des parents d’élèves dans le mouvement contre les réformes Darcos.

Par le geste symbolique fort qu’a été son entrée en désobéissance, annoncée par lettre ouverte au Président de la République, Bastien n’avait d’autre but que de donner plus de retentissement au mouvement collectif de contestation des contre réformes conduites actuellement par notre Ministre de l’Education Nationale selon une politique cohérente et systématique, qui concourt au démantèlement du service public de l’éducation nationale, et partant, à accroître les inégalités scolaires et sociales.
Cet forme d’engagement inédit en rencontrant un large écho, a suscité la solidarité de ses collègues, et le soutien des parents de ses élèves. Elle aura pour partie contribué à l’affirmation de cette Ecole en résistance qui veut préserver toutes les missions et valeurs du service public d’éducation, accroître son efficacité, améliorer les chances de réussite de tous nos élèves.

Mais en cela, elle a également valu à notre collègue Bastien, l’acharnement de son administration, qui s’est traduit par des sanctions pécuniaires lourdes et répétées, et ces derniers jours, l’ouverture d’une procédure, disciplinaire officielle.

L’Inspection académique, en renonçant à toute sanction ou procédure disciplinaire, semble avoir pris la mesure aujourd’hui de la confrontation majeure dans laquelle elle s’était engagée, et dont l’issue, au vu de la réaction massive des parents et enseignants du département, apparaissait pour le moins incertaine.

Bastien pour sa part, assurera la totalité de ses obligations de service à la rentrée de janvier, notamment à en accueillant des élèves sur le temps dévolu à l’aide personnalisée, poursuivant son action de résistance, dans des formes collectives déterminées par l’ensemble des collègues.

Ceci ne signifie en rien un renoncement à ses convictions, à ses engagements, ni l’abandon de son action contre les réformes de l’école actuelles, bien au contraire. Celle ci se poursuivra dans le contexte nouveau d’une mobilisation élargie que sa  » désobéissance « , comme celle de ses collègues aura modestement contribué à développer.

L’article de Midi Libre sur le rassemblement de mercredi est consultable ici

Le rassemblement a lieu à l’appel de l’Intersyndicale de l’Hérault: SNUipp-FSU, SUD Education, Snudi-FO, SNE-Csen, CNT Education.

Journée nationale des désobéisseurs dans l’Education Nationale

Depuis plusieurs semaines, des envois collectifs de lettres de désobéissance sont organisées dans de nombreuses académies, signe de la montée en puissance d’un mouvement inédit de résistance dans l’Education Nationale.

Les enseignants désobéisseurs ne veulent pas être les instruments passifs et complices du démantèlement de l’Education Nationale. Ils organisent leur résistance au grand jour, à visage découvert, en assumant le risque de la sanction. Dans l’intérêt des élèves, des parents d’élèves, ils s’élèvent dignement pour construire une école de la réussite pour tous.

Dans de nombreuses régions, la journée du mercredi 17 décembre sera l’occasion d’organiser des remises de lettres individuelles et collectives de désobéissance à la faveur de rassemblements devant les Inspections Académiques. Le blog Résistance pédagogique se fera l’écho de ces initiatives en publiant les lettres individuelles et collectives des enseignants désobéisseurs.

A Montpellier, un grand rassemblement est organisé à 15h devant l’Inspection Académique de l’Hérault pour la remise d’une centaine de lettres de désobéissance en présence notamment de Bastien Cazals, d’Alain Refalo et de Philippe Cherpentier, trois des premiers enseignants désobéisseurs. Cette journée de la désobéissance civile dans l’Education Nationale prendra un relief tout particulier à Montpellier après les sanctions financières disproportionnées infligées à Bastien Cazals.

D’autres rassemblements auront lieu à Toulouse, à Marseille, à Paris, et dans plusieurs villes de France.

Vous pouvez consulter : Blog Résistance pédagogique pour l’avenir de l’école

La lettre de Bastien Cazals et toutes les informations peuvent être consultées sur le site suivant :

http://uneecolepourvictorethugo.hautetfort.com

Vous pouvez télécharger pour diffusion la lettre ici.

Un portrait de Bastien Cazals est paru dans Midi Libre du samedi 12 décembre : voir ici.

Le communiqué de Bastien Cazals aprés sa convocation est lisible ici

La Lettre

Montpellier, le 25 novembre 2008,

Cazals Bastien

Montpellier

à

Monsieur le Président de la République

Palais de l’Elysée

55, rue du faubourg Saint-Honoré

75008 Paris

Monsieur le Président de la République,

Si je prends la liberté de vous écrire cette lettre, c’est qu’aujourd’hui, en tant qu’enseignant et directeur d’école comme en tant que citoyen, je suis en colère, proche de la révolte. Je ne peux plus me taire. Je me dois de réagir.

Permettez-moi, tout d’abord, d’insister sur l’expression de mon profond attachement et de mon immense respect pour cette République française dans laquelle j’ai eu la chance de venir au monde. Je suis attaché à ce pays car je considère qu’à certaines périodes de sa longue histoire, il s’y est dit, écrit et fait de si belles choses. Outre l’immense patrimoine culturel qu’elle a constitué, la France – tout particulièrement de sa révolution de 1789 au programme du Conseil National de la Résistance, en passant par la République et sa loi de 1905 sur la laïcité – a su porter si haut et avancer si loin les valeurs universelles consacrées dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen qu’elle a fini par faire le choix ambitieux d’une république laïque et démocratique où tous les citoyens vivent ensemble, en bénéficiant de la liberté, de l’égalité et de la solidarité ! Tellement admirable que j’ai choisi de servir cette République, ma République. J’en serais presque fier… sauf que je ne suis pour rien dans tout cela, j’en hérite. Et un tel héritage se partage ou se défend !

C’est ainsi que j’arrive à l’objet de ma lettre. En ce début de XXIème siècle, que reste-t-il de l’état républicain à la fois puissant et protecteur, comme de ses grandes missions d’intérêt public ? Plus grand chose : les idéologies en vogue étouffent la flamme républicaine tandis que les réformes en cours dépècent les derniers lambeaux des services publics. D’autres pourraient citer la justice, la santé ou la solidarité, je vous parlerai de ce que je connais, de ce que j’ai choisi : l’école primaire publique.

Monsieur le Président, autant vous le dire de suite, avec les transformations qui s’opèrent actuellement, l’État ne pourra plus garantir à chaque citoyen les mêmes droits en terme d’éducation. Et il s’agit, là, du déni d’un droit fondamental, surtout dans une république qui se prétend historiquement éclairée par le savoir et la pensée, la finesse et le bon goût. Cette  »modernisation » de l’Éducation Nationale, qui se construit pas à pas depuis des années, avance sur plusieurs plans à la fois mais dans une grande cohérence. Sachant que votre temps est précieux, j’ai donc choisi de n’en aborder qu’un aspect, le plus saisissant.

Ayant déclaré la guerre contre l’échec scolaire, votre ministre en charge du dossier a entrepris de moderniser l’école prétendument dans l’intérêt des élèves mais avec quand même, dans un coin de la tête, les impératifs budgétaires liés à la mise en œuvre de la Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP), au respect du pacte européen de stabilité et autres contingences financières. Ainsi, à cette rentrée 2008 et sans concertations préalables aux prises de décisions, M. Darcos a ainsi décidé :

de mettre en place des nouveaux programmes qui conviennent parfaitement aux élèves comme ma fille, qui est structurée, attentive et appliquée, mais ne laisseront que peu de chances à son copain Victor de surmonter ses difficultés d’apprentissage ;
de diminuer le nombre d’heures de classe pour les élèves comme ma fille qui travaille bien et comprend vite mais pas pour Victor qui est soutenu 2h par semaine dans ses difficultés d’apprentissage ;
et de renforcer le dispositif de stages de remise à niveau en CM1/CM2 pour que Victor entretienne ses difficultés d’apprentissage pendant les vacances de ma fille…

Mais ce n’est pas tout – et Victor est finalement un peu chanceux, car la rénovation du primaire est en cours et, pour la rentrée 2009, sans plus de concertation, M. Darcos nous annonce qu’il va :

supprimer progressivement les enseignants membres du Réseau d’Aides Spécialisées au Enfants en Difficulté (RASED) qui aident Victor pendant le temps scolaire et sans lui refaire la classe ;
mettre toujours plus d’élèves par classe – puisque toujours moins d’enseignants – ce qui ne plaira pas trop à ma fille qui aime avoir l’attention de la maîtresse mais beaucoup à Victor qui préfère se faire oublier ;
et remplacer la prise en charge à l’école publique des 2/3 ans par leur accueil dans des structures locales payantes, ce qui n’affectera pas la scolarité de Victor mais de son petit frère Hugo qui restera encore un an à la maison avec sa maman car « sa veau pas l’coup de bosser au smig si faut payer le jardin des veilles » ! Hugo n’aura donc pas la chance de son frère de bénéficier des apports langagiers et de la stimulation cognitive d’une première socialisation à l’école maternelle.

Croyez-vous sincèrement, Monsieur le Président, que votre ministre pourra, par de telles réformes, atteindre l’objectif qu’il s’est fixé de diminuer par trois le nombre d’élèves en difficulté ? Et pouvez-vous m’affirmer que l’école primaire de demain continuera d’assurer à tous les élèves des chances égales d’émancipation sociale ?

Actuellement, nous assistons à la mise en œuvre, à marche forcée, des dernières grandes étapes de la transformation du système éducatif français. J’en veux pour preuve l’autoritarisme croissant exercé par la hiérarchie, le souci de rendre improductif l’exercice du droit syndical au travers du Service Minimum d’Accueil (SMA), ou celui de faire surveiller l’opinion et l’activisme des enseignants !

Aussi, comme bon nombre d’entre eux, j’entre aujourd’hui en résistance parce que je ne peux me résoudre à ce que l’école publique, mon école, ne se préoccupe ni de Victor, ni de Hugo, sans être pour autant en mesure de faire éclore un nouveau Victor Hugo. La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration (article 15 de la DDHC de 1789) c’est pourquoi d’un fonctionnaire dévoué je me vois contraint de devenir un fonctionnaire désobéissant ! En conséquence, en tant qu’enseignant tout d’abord, je prends les décisions suivantes :

Je n’appliquerai pas les nouveaux programmes mais continuerai à travailler dans l’esprit des programmes de 2002 (qui n’ont d’ailleurs fait l’objet d’aucune évaluation).
Je n’effectuerai pas l’aide personnalisée auprès des élèves (qui est destinée à remplacer l’aide spécialisée du Rased) mais mettrai à profit ces 60 heures annuelles pour rencontrer les parents deux fois dans l’année (en milieu et fin d’année), organiser les projets pédagogiques collectifs et également pour faire vivre la bibliothèque de mon école (qui est actuellement sous-utilisée faute de personnel mis à disposition).
Je ne déclarerai pas à l’administration mon intention de faire grève, 48h à l’avance, mais j’informerai, comme par le passé, les parents d’élèves au moins deux jours avant.
Je ne me porterai jamais volontaire pour les stages de remise à niveau ni ne transmettrai de liste d’élèves.

Ensuite, en tant que directeur, je prends les décisions suivantes :

Je ne participerai plus au fichage centralisé des écoliers via Base Elèves
Je ne traiterai plus que les demandes administratives qui concerneront directement les élèves, mes collègues ou le fonctionnement de mon école.
Enfin, en tant que simple citoyen en dehors de tout parti politique, je n’empêcherai pas la diffusion de ces prises de position professionnelles mais au contraire, tenterai de participer à l’émergence d’une résistance citoyenne et non-violente, porteuse d’un projet de société généreux et ambitieux – depuis la crise financière, nous savons tous qu’il est possible de trouver beaucoup d’argent lorsque c’est nécessaire – car notre République est en train de tourner le dos à ses dernières missions d’intérêt public…

Conscient que vous ne mesuriez probablement ni l’ampleur du désastre qui menace l’école, ni celle de la colère qui submerge le monde enseignant, je sais que vous entendrez mon appel et ne décevrez pas l’espoir que je mets dans la grandeur de votre fonction.

Je vous prie de recevoir, Monsieur le Président de la République, l’expression de mon attachement respectueux à la dignité de l’État républicain laïc et de croire en ma détermination à continuer d’œuvrer pour tous les élèves qu’ils soient ma fille, Victor ou Hugo.

CAZALS Bastien

Article de Midi Libre Montpellier.

Édition du mardi 2 décembre 2008
L’instituteur convoqué après sa lettre à Sarkozy

Depuis quelque temps, il ne fait pas bon donner son opinion quand on est enseignant. Et Bastien Cazals vient de l’apprendre à ses dépens. Directeur de l’école maternelle Louise-Michel, à Saint-Jean- de-Védas, il a adressé, la semaine dernière, au président de la République, Nicolas Sarkozy, une missive dans laquelle il fait part de ses sentiments et exprime sa position par rapport aux réformes mises en place dans l’Éducation nationale par le ministre Xavier Darcos. Des initiatives gouvernementales (suppression des Rased, de la petite section de maternelle, nouveaux programmes…) qui, rappelons-le, ont donné lieu le jeudi 20 novembre à des manifestations organisées un peu partout en France et notamment à Montpellier (Midi Libre du 21 novembre).

Jusque-là, rien de vraiment
répréhensible dans la démarche. Seulement voilà, hier, Bastien Cazals a reçu une convocation émanant de l’Inspection d’académie l’informant qu’il a rendez-vous demain, à 8 h 30, avec l’inspecteur d’académie pour évoquer le contenu de la fameuse lettre. Autant dire que la démarche a eu vite fait de déclencher l’hallali chez les syndicats, les enseignants et parents d’élèves.

Dès hier soir, l’intersyndicale SnuIPP-FSU, Sud éducation, SNE-CSEN, Snudi-FO et CNT éducation marquait son indignation et son soutien à Bastien Cazals. « On s’opposera à toute forme de sanction qui pourrait être prise par l’autorité académique, tonne Joël Vezinhet. Notre collègue, par son initiative, incarne la résistance qui s’organise collectivement dans tout le département. » L’intersyndicale, qui souhaite être reçue en même temps que l’instituteur védasien, rappelle par ailleurs que « les fonctionnaires sont des citoyens comme les autres, qui ont le droit, à ce titre, à la liberté d’expression, surtout quand elle est mise au service de la défense de l’école publique ! » Un appel a été lancé à tous les personnels afin qu’ils viennent exprimer leur solidarité en se rassemblant devant l’inspection d’académie de Montpellier, demain, à partir de 8 h 30 .

Soutiens Mise en ligne sur le site http://uneecolepourvictorhugo.hautetfort.com, la lettre de Bastien Cazals a déjà reçu 5 000 visites, et près de 250 personnes ont apporté leur soutien sur Facebook.

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