LENINE à MONTPELLIER ?

George Frèche a flashé sur une statue en bronze de Lénine déplacée de Tchécoslovaquie à Seattle après la fin du rideau de fer. Il voudrait que Montpellier l’achète et l’installe.

Les indignations de la droite, bien évidemment horrifiée de voir un révolutionnaire russe ainsi honoré, font qu’on peut reconnaître au grand septimaniaque un certain sens de l’humour.

On avait souri aussi quand l’allée du conseil régional avait été rebaptisée « impasse de Vichy » en 1998 après l’alliance entre Blanc et le FN.

Mais, on n’oublie pas non plus que depuis Frèche s’est aussi distingué par des provocations qu’on entend d’habitude dans la bouche de Le Pen.
Surtout, une fois l’amusement passé, cette annonce pour une statue pose quelques petits problèmes politiques.

La concomitance

Ce n’est pas la première fois qu’un révolutionnaire marxiste est honoré à Montpellier.
On a ainsi une rue Leon Trotsky, une rue Rosa Luxembourg et une rue Karl Liebknecht. Mais ces rues ont été ainsi baptisées après que Frèche ait intégré des anciens OAS sur sa liste en 1995, un coup de barre à droite compensé par un petit symbole destiné à séduire l’extrême gauche.

Aujourd’hui, même si ce n’est pas forcément calculé, il est cocasse de voir dans la presse l’alliance PS-PC-MODEM pour les municipales annoncée en même temps que l’arrivée d’une statue de Lénine.

Comme quoi les symboles sont peu de choses à côté des choix réels.


Le caprice

Que ce soit Lénine n’enlève rien au fait qu’on assiste encore à un caprice du prince. Il est séduit par une statue sur un autre continent et l’argent public devrait servir à ramener la dite œuvre sans aucune concertation, de même qu’il y a trois ans, sans en avoir jamais parlé pendant sa campagne électorale, il avait voulu débaptiser le Languedoc-Roussillon pour lui imposer un nom ridicule.

Les références historiques et les autres statues.

Dans sa tentative d’explication, on notera quelques remarques justes : « Lénine a réussi la révolution d’Octobre quand la Commune a échoué » ou « Lénine, ce n’est pas Staline ».
Mais on trouve aussi une inquiétante référence à Mao, héros de jeunesse de Frèche, qui n’y est pas présenté comme un tyran, mais par opposition à Staline.

Frèche annonce aussi que Lénine sera accompagné d’autres statues : Mao, Churchill, Roosevelt, il serait même envisagé un tourisme autour de ces monumentales statues. Quand on connaît l’attrait de Frèche en matière d’art et de décor, pour le néo-classicisme quelque peu mussolino-stalinien, il y a de quoi s’inquiéter.

Faut-il statufier Lénine ?

À nos yeux, il y a bien sûr, opposition entre Lénine, d’une part, et Staline, (mais aussi Mao) d’autre part.

Avec les bolcheviks, Lénine a au pouvoir certainement commis des erreurs et peut être permis par certaines décisions que plus tard le stalinisme naisse. Reste que Lénine a conduit une révolution à l’origine d’un grand espoir dans une période extrêmement difficile : la première guerre mondiale puis les violentes tentatives d’abattre la révolution. Il a œuvré pour une société juste, égalitaire et fraternelle dans un pays cependant arriéré économiquement et culturellement.Enfin, dans la dernière période de sa vie, malgré la maladie, il a pris conscience du risque que représentait Staline et tenté de le combattre.

Cependant, il ne faut pas oublier que la mode des statues de Lénine ne date pas de la révolution mais de la période stalinienne.
L’embaumement de Lénine en 1924, c’est un peu l’embaumement de la révolution et sa bureaucratisation, le culte de la personnalité pour Lénine est impulsé par Staline et prépare le sien.

On fit partout en URSS des statues de Lénine pour mieux oublier son message et son combat.

DH
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